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Nels : Histoire d'un mage sans passé : Chapitre 03

Le culte Sombre : ce n'était pas le genre de nouvelles que l'on apprécie particulièrement à l'Académie. Pourtant je ne me sentais pas de taille, vu que certains avaient perdu la vie dans des affrontements sans pitié. Je me promène dans la ville, des enfants jouent, leurs mères les regardent, je sais que les pères doivent être en train de travailler. Je ne n'ose m'imaginer ce qui se passerait si je m'amusais à ne rien faire... Je ne veux surtout pas. Le soir tombe très vite, trop vite. Il faut absolument trouver une solution, et je sais qui peut m'aider. Je me suis rendu à la plage, je dois entrer en communication avec Maître Basaïn. Lui saura me donner de plus amples explications. Je suis près de l'eau, je défais ma cape en m'assurant que personne ne me regarde, puis me concentre. Toujours la même sensation, ce flux qui m'envahit, cette puissance qui me traverse. Les saphirs de ma bague et de mon médaillon commencent à briller d'un éclat bleu qui s'intensifie comme ma concentration, je dois désormais focaliser Basaïn, sa sagesse me sera d'un grand secours. Lorsque je sens son aura, j'essaie de communiquer :

- Maître, Maître, c'est moi, Nels

- Nels, je te sens, qu'y a-t-il ? Je sens que tu es effrayé... je n'ai plus l'habitude de sentir la peur en toi...
- Greyport est menacée, je dois agir, on m'a demandé de l'aide pour combattre...
- Le culte Sombre est de retour n'est ce pas ? La famille d'Althor avait été prévenue par des membres de l'Académie. Cela fait longtemps déjà. Les stèles avaient été découvertes par un de mes maîtres, lors de ma formation. Le problème c'est que la famille d'Althor avait payé les terrains, et en voulait pour son argent. Ils n'écoutèrent pas. Si j'étais totalement juste, je te dirais de ne pas t'en mêler.
- Si je n'arrête pas le Sombre, il y a suffisamment d'âmes ici à Greyport pour qu'il devienne très puissant. Qui plus est, les notables de la ville disent que l'Académie est redevable à la ville.
- Redevable est un bien grand mot. Greyport est un port et nous vous y faisons débarquer voilà tout. Si certains élèves avaient su tenir leur langue, nous n'en serions pas là. Néanmoins, je ne laisserai pas un Sombre devenir si puissant au détriment de tant de gens. Tu es assez puissant pour combattre, je ne voudrais pas t'avoir pour ennemi, Nels, mais fais attention : les Sombres sont sans pitié et n'hésitent pas à mettre la vie des gens qui les entourent en danger pour te faiblir. Si tu le combats, essaie d'être en dehors de la ville. Autre chose, ses capacités noires peuvent t'être fatales. Tu maîtrises bien les sorts Noirs, mais leur emprise sur lui sera limitée. Utilise le Vert, pour te revitaliser, et le Bleu pourra te permettre de le contrôler.
- Maître, j'ai peur non pour moi mais pour ces pauvres gens qui n'y sont pour rien. Ils ne savent pour certains même pas ce qu'ils risquent. Ce n'est qu'une petite bourgade, une ville paisible.
- Garde les à l'esprit sans cesse, ça va être une bonne motivation. Repose toi, demain va au port et attends la barque, je t'envoie quelque chose qui te sera utile.
- Merci Maître.
- Désormais repose toi, je pense que tu vas avoir des jours difficiles.

Difficile, la nuit l'est déjà. Une nuit agitée par des cauchemars, j'entends des cris d'enfants dans mon sommeil, je vois déjà des gens du Sombre commencer leur sinistre rituel. Toute cette horreur me glace le sang, je n'ai plus qu'une idée en tête : récupérer ce que m'a envoyé Maître Basaïn et aller combattre. Il faudrait sûrement que je me serve d'une épée, je n'avais pas peur car à l'Académie nous y sommes entraînés, qui plus est nos épées sont aussi des artefacts puissants qui deviennent vite dévastateurs en des mains expertes. Cependant, je n'ai emporté de l'Académie que mes bagues, le diamant à mon bras droit, et mon pectoral. Je ne voulais pas d'armes, car le combat n'est pas mon activité favorite. Etant un mage puissant, il a bien fallu que j'apprenne l'art de la guerre, comment diriger une armée, comment planifier une attaque... Parfois il arrive que certains rois préfèrent voir à la tête de leur armée des mages, sans compter que certains élèves de l'Académie sont de futurs rois, qui auraient à défendre tout un pays. Les armes de l'Académie étaient d'abord des épées de bois, pour entraîner notre technique et pour ne blesser personne. Les élèves Nains de l'Académie n'aimaient pas beaucoup les épées, on leur fournissait des haches de bois qu'ils utilisaient de manière redoutable.

Lors de mon apprentissage, j'ai été très vite pris en main par les maîtres Bardéak et Basaïn. J'ai suivi la formation pour le Vert avec d'autres car c'est une couleur qui nécessite une formation en groupe afin de mieux sentir les flux vitaux de la magie verte. Cependant, les autres couleurs m'ont été enseignées par mes deux maîtres. Et Bardéak se fit un devoir de m'apprendre l'escrime à l'écart des autres : il fut un maître aussi dur qu'efficace, compliment devait être un mot que son vocabulaire ne connaissait pas. Il ne savait que me lancer des répliques désobligeantes au sujet du fait que je ne frappais pas assez fort, que ma vitesse était "comparable à une tortue, mais fatiguée", que ma technique brillait par son absence, un véritable calvaire. D'ailleurs les dizaines d'heures de cours d'escrime imposées par Bardéak me musclèrent et ce de manière complète : l'entraînement comprenait de véritables marathons, je devais soulever des charges lourdes, étirer mes muscles et ensuite seulement venait l'enseignement de la technique. Très vite, nous passâmes de l'épée en bois à une épée très lourde, en un métal sombre. Un jour, alors que nous allions commencer l'entraînement, Bardéak me dit :
- Je commence à me fatiguer de devoir t'apprendre l'escrime, je vais te présenter le maître d'escrime, Maître Zohrskt de Licht, Grand chevalier Blanc de Licht.
Nous arrivâmes bientôt dans une grande cour où des élèves se battaient avec leurs épées et haches de bois. Ce chevalier était grand, vêtu de blanc, une magnifique armure blanche. A sa main gauche, une bague avec la perle blanche caractéristique. Son visage reflétait une grande sagesse, ses cheveux blonds ajoutaient à la blancheur de son teint. Ses yeux me parurent étranges, d'un bleu presque translucide. Il ne se servait pas de son épée, qui était à son côté, dans un fourreau blanc, et tenait à la main une des épées d'entraînement en bois. Il semblait étonnée de me voir avec Bardéak, et prit la parole d'une voix étonnamment douce pour un homme de sa stature :
- Tu me présentes enfin ce fameux jeune homme dont la rumeur dit qu'il ne sait de sa vie d'avant l'Académie que son nom?
- C'est bien lui Zohrskt, dit calmement Bardéak.
Je dus me retenir de rire en voyant le visage des élèves changer, voire se pétrifier en voyant Bardéak. C'est vrai qu'il imposait le respect de par sa haute taille, ses habits noir et sa voix tonitruante, surtout quand il était en colère ce qui arrivait très souvent. Cependant je ne m'effrayais plus de le voir, il m'était familier à cause de toutes les heures d'entraînement que nous avions passé ensemble, et au bout d'un moment il arrivait même que je le fatigue lors de nos combats d'entraînement. Je vis Leblis qui combattait, le pauvre elfe semblait un peu faible par rapport a son adversaire, un humain très musclé, qui semblait avoir une force peu commune. Alors que les deux maîtres parlaient entre eux, je prêtai attention au combat de l'elfe qui avait toutes les peines du monde à résister à son adversaire. D'un revers violent, leurs épées s'entrechoquèrent et Leblis fut au sol. L'autre allait abattre son épée sur lui, mais je lui criai :
- Je ne savais pas qu'un sorcier se comportait en barbare.
- Mêle toi de ce qui te regarde, ou t'auras le même sort.
Je sentais la colère monter en moi, une colère forte qui ne me donnait qu'un envie: prendre une épée et foncer sur lui. Cependant, Zohrskt parla, toujours de sa voix douce :
- Karl, je ne savais pas que c'était ainsi que les mages se parlaient entre eux.
- Il n'est rien par rapport a moi non ?
- Karl tu ne seras jamais bon si tu sous estimes ceux qui t'entourent. Je commence à ne pas apprécier ton attitude irrespectueuse, dit Bardéak
- Vieil homme que vas tu faire ? Ne sais tu pas qui est ma famille ? Je deviendrai chevalier, que tu le veuilles ou non. Fais attention, je ne sais pas qui de nous deux est irrespectueux.

C'en était trop, je ne savais pas pourquoi mais ce Karl m'horripilait au plus haut point, alors j'empoignai une épée de bois et je lui lançai :
- Moi je ne sais pas mon passé, je sais pas qui est ta famille, mais d'une je pense que tu en est indigne, et de deux je sais que tu vas te prendre une correction.

Zohrskt n'avait rien dit pas plus que Bardéak, mais Karl enchaîna :
- Je pense que si les maîtres bougent pas, je vais devoir te tuer; le tout avec un sourire en coin.
- Ah oui? Avec l'aide de quelle armée?

Zohrskt semblait ravi, mais pas autant que Bardéak, qui je pense allait presque se frotter les mains. Karl lui, inexplicablement, se retourna et ce fut avec une grande surprise que je le vis se ruer sur moi avec une épée non d'entraînement mais une vraie. Bardéak me lança une épée, la sienne directement... Là je devais avoir une tête de merlan frit, d'avoir cette si puissante épée entre les mains et je me la suis imaginée lourde au point de craindre la sciatique au moment de la saisir à deux mains. Je saisis la poignée... une véritable plume comparée à l'épée que Bardéak utilise pour m'entraîner.

Karl fonce vers moi, l'épée de Bardéak est dans ma main, et bizarrement, je trouve ce grand lourdaud de Karl lent, surtout au moment d'abattre son épée sur moi. D'un mouvement de coté je l'esquive, et me retrouve à sa droite. Il balaye l'air avec son épée : il combat avec la finesse d'un taureau décidément. J'esquive à nouveau, lentement, et du plat de la lame je lui assène un coup violent sur la nuque. Ca l'a à peine étourdi, impressionnant finalement le Karl. Au moment où il se retourne, il lève son épée et va l'abattre sur moi, je pare, et lui entaille le bras, une jolie éraflure à la base du coude. Il est peut être pas très fin, mais il me touche à l'épaule... Il a même du me briser des os, ça me fait atrocement mal. Je ne peux même plus bouger le bras gauche, et Karl lui va finalement m'achever. Je sentis alors un flux chaud me parcourir, une sorte de feu qui me parcours d'autant plus que la douleur enflamme ma colère. Le rubis de la poignée de l'épée de Bardéak brille, de plus en plus fort, et l'ami Karl semble décidé à me charger comme une vraie brute. Ne sentant plus ma force, n'ayant qu'une envie, le tuer, je me mets à foncer moi aussi. Nos épées s'entrechoquent, et finalement la sienne ne fait pas long feu : elle est brisée comme son poignet d'ailleurs.

Ce fut ma première victoire à l'épée à l'Académie lors de duels, et non la seule, ni la moins douloureuse. Tout en rêvassant à cette victoire, je suis arrivé au port et je reconnais la barque.
Je vais vers l'homme qui ôte alors son capuchon :
- Nels monte.
- Maître Bardéak? Que me vaut le plaisir?

Nels

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