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Blackclaws : Blackclaws - 5

Alors que le mage venait de partir, les deux jeunes hommes se regardèrent en chiens de faïences quelques instant puis, Wakao se tourna et sortit chercher du bois. Thäan se tourna vers Loa, la fixa quelques instants et porta ses yeux sur ses mains.
Décidément ces gants lui réservaient pas mal de surprises. Mais la question qui le dérangeait le plus c'était de savoir si c'était vraiment les gants qui avaient tout fait ou si ils n'avaient agi qu'en tant que catalyseur d'une magie qu'il ne se connaissait pas. Bon, en même temps, il était apparu un soir chez ses parents, porté par les bras d'un pratiquant des arts occultes et son petit doigt lui disait qu'il n'était pas au bout de ses surprises.
Ils se relayèrent quelques jours au chevet de la jeune femme, le temps qu'elle revienne à elle et qu'elle puisse marcher à nouveau. Puis, ils s'organisèrent pour passer l'hiver approchant.
Ils partaient à la chasse à deux en tournant sur qui faisait quoi, se partageaient les corvées et faisaient une grosse réserve de bois. Tous les après midi, Wakao entraînait Thäan au maniement des armes. Ils avaient découvert une cache où l'ancien propriétaire des lieux avait dissimulé quelques armes certainement pour palier à toute situation.
Ainsi Thäan avait choisi d'apprendre le maniement des cimeterres. Wakao lui avait conseillé de laisser une des deux lames courbes pour prendre un objet de défense, mais le jeune homme aux yeux arc en ciel préférait se passer d'un bouclier, certain que ça le gênerait plus qu'autre chose.
Alors qu'il faut des années pour apprendre le maniement d"une épée, Thäan ne mit que quelques jours à apprendre les techniques de base et au bout de sept semaines arrivait à tenir tête à Wakao, qui pourtant traînait derrière lui plus de dix ans de pratique assidue de sa hast-épée.

Ainsi passa l'automne. Quand le froid commença à s'installer, ils finissaient juste d'installer confortablement la cabane pour vivre a trois. Lyokham passait les voir au moins une fois par semaine, il les tenait au courant des dernières nouvelles des royaumes.
A des centaines de kilomètres de là, une ombre noire faisait les cents pas dans la Grand Salle du château. Il avait été convoqué en urgence par son suzerain sans aucune information. Tout ce qu'on lui avait dit, c'était d'attendre ici. Sa dernière mission ayant failli échouer, il avait peur de finir enfermé au fond d'une oubliette.
Il avait eu juste le temps de passer quelque chose de convenable pour paraître devant son roi et avait accouru dans la salle du trône. Il connaissait cette pièce par coeur. Les murs étaient couverts de tableaux désignant à chaque fois une victoire du Royaume de Garhdazs. Mais la plus belle oeuvre de cette salle était sans aucun doute le plafond. Une fresque dessinait toute la famille Garhdazsko. Chaque visage était accompagné du nombre d'années resté au pouvoir et le nombre de victoires gagnées sur les champs de bataille.
Le vieux Sriao avait été un bon roi, mais il avait engendré un être plus mauvais que la peste. Ce royaume où il faisait bon vivre il n'y a pas dix ans est devenu une sorte d'enfer sur terre. Les habitants, ruinés par les multiples impôts et autres taxes, se trouvaient obligés d'envoyer tous leurs enfants de sexe masculin au château pour les enrôler dans l'armée du royaume. Il ne restait donc que les femmes pour faire tous les travaux de maison.
Certains essayaient bien de quitter le royaume, mais ils étaient alors rattrapés par la garde, massacrés et exposés en place publique. De plus, le fils de Sriao était un ardent pratiquant des arts occultes et excellait surtout dans la nécromancie. Peu de mages pouvaient se targuer d'avoir une aura aussi forte que la sienne.
Soudain, un grondement se fit entendre dans la salle et fit vibrer les murs. Un nuage noir comme de l'encre flottait à présent au dessus du trône. La masse gazeuse se concentra pour laisser place à un homme de grande taille, les yeux bleus et les cheveux blonds comme les blés. Il était vêtu d'un pantalon vert, d'une veste bleu nuit et d'une cape rouge bordeaux. A peine le fils de Sriao fut reconstitué, qu'il s'agenouilla devant son monarque.
Ce dernier s'assit sur le trône et fit signe à l'homme de s'approcher.
- Dis moi Galiyl, fit le monarque. Pourquoi crois tu que je t'ai fait appeler ?
- Je n'en ai aucune idée, majesté, répondit-il
- J'ai une mission pour toi.
- Ca serait un honneur .
- Et tu n'as pas idée à quel point. Le monarque se leva et s'approcha de Galiyl. Dans quatre semaines, une nouvelle éclipse va avoir lieu et nous avons besoin de « consommables ».
- Vous avez une préférence pour l'origine de ces « consommables » ?
- Oui, tu vas partir sur la Route Marchande .
- Bien maître.
- En arrivant au village de Brésolth, tu récupèreras cent femmes, puis tu anéantiras tout les mâles de moins de vingt cinq ans... Non, brûle le village, qu'il ne reste aucune âme vivante.
- Brûler ? Mais ...
- Ne pose pas de questions inutiles et fais ce que je te dis, le coupa le monarque en lui lançant un regard noir. Tu prendras le chariot de Ynos, il te permettra de gagner du temps et je te laisse libre de l'équipe qui t'accompagnera.
- Bien, je pars sur l'heure, répondit Galiyl, mal à l'aise.
Il se leva, salua son roi et tourna les talons. Sur le pas de la porte, il entendit le monarque chuchoter "Ne nous déçois pas". Un frisson lui parcouru l'échine puis, il ferma la porte.

- MARCELLE ! ! héla le monarque.
Sur le sol de dalle noire apparut un grand cercle brillant. Fait entièrement de runes, un autre cercle apparut au milieu du premier cercle. Les deux figures se mirent a tourner chacune dans un sens de plus en plus vite.
Une colonne de lumière se forma et laissa apparaître une jeune femme au cheveux blancs mais au visage fin et aucunement entravé par une quelconque ride. Le cercle disparut et elle s'avanca vers le roi.
Mon dieu, ces couleurs...
- Bonjour mon petit roi, fit elle en passant sa main dans ses cheveux.
- Où en êtes vous de la cérémonie ?
- L'autel et les réceptacles de ce monde seront prêts dans deux jours, mais les jumeaux souhaiteraient te parler.
- Et bien, qu'ils viennent... Ah oui, ils ne sont pas dans cette dimension.
- GERARD !! DEDE !!!, cria-t-il
Deux hommes grassouillets apparurent sous leur forme astrale. L'un était debout l'autre à genoux.
- Bonjour maître, fit le premier, se penchant sur le sol.
- Maître, bonjour, fit le second se relevant
- Que voulez vous ? fit le souverain
- L'autel et les réceptacles sont presque prêts pour accueillir les offrandes, fit Dédé.
- Mais on risque de manquer de temps pour finir le pont entre la réalité et ce plan, continua Gérard
- Comment ? fit le roi. Vous vous débrouillez comme vous voulez, mais je veux que dans une semaine le pont soit fini et praticable.
- Mais..., firent les jumeaux en choeur.
- Une semaine, répéta le roi avec un regard noir.
Les jumeaux se regardèrent et rompirent le contact.
Quelle bande d'incapables, pensa le roi.
Il regarda Marcelle et lui fit signe de partir. Celle-ci claqua des doigts et disparut. Se retrouvant tout seul, le souverain s'assit sur le trône et se perdit dans ses pensées.
Derrière le trône taillé dans le roc et recouvert de dorures, le tableau représentant son aïeul s'anima et changea de forme.

Depuis maintenant quelques semaines, le froid s'était abattu sur la cabane où vivaient les trois jeunes gens. Les jours passaient et se ressemblaient. Le matin était consacré aux corvées et l'après-midi, à l'entraînement physique et psychique.
Wakao et Loa n'en finissaient pas de s'étonner de l'étonnante faculté d'apprentissage de leur ami. Thäan était maintenant capable de tenir tête à Wakao et s'amusait à faire enrager Loa en lui renvoyant tous ses sorts.
De temps en temps, Lyokham venait leur rendre visite pour voir si tout ce passait bien et leur relatait quelques aventures qu'il avait eu il y a longtemps, quand il partait encore sur les routes. Mais la plupart du temps, il venait surtout pour surveiller la jeune Loa ainsi que pour mettre à l'épreuve Thäan et sa résistance à la magie.
Un jour, alors que Lyokham venait de les quitter, Loa partit chasser.
- Fais gaffe fillette, fit Thäan, tu sais que la nuit tombe très vite en hiver.
- T'es sure que tu veux y aller seule ? continua Wakao.
- Oui, ça fait plus de deux mois que vous me couvez. Je veux me débrouiller toute seule. Je serai de retour dans trois heures environ.
- Si tu venais à avoir un problème, tu connais le code, n'est-ce pas ?
- Oui, trois boules rouges et deux bleues.
Elle prit son arc, son carquois et sortit.
Wakao regarda son compagnon et attrapa l'hast-épée estampillée du corbeau.
- On a du temps à tuer... On se fait un assaut ?
- Ma foi, il faudra bien que tu me battes un jour, le taquina Thäan.
- On fait un assaut purement physique, ça te va ?
Son comparse acquiesça et attrapa ses deux cimeterres.
Ils sortirent en même temps, se firent face et se mirent en garde.
Wakao leva son arme à la verticale, lame vers son adversaire, tranchant en haut et baissa ses appuis.
Thäan croisa ses bras, lames vers le haut , et joignit ses pieds. Ils restèrent immobiles, se fixant dans les yeux. Un oiseau s'envola et le duel s'engagea.
Wakao avança avec une rapidité déconcertante et lança son arme. Thäan, qui n'avait pas encore bougé le petit doigt, baissa ses armes et recula d'un pas. la première attaque de Wakao échoua, mais celui ci se servit de l'élan de cette attaque pour continuer et lança le manche de l'hast-épee. Thäan para avec un cimeterre et contre attaqua avec l'autre. Son adversaire esquiva d'un pas chassé et abattit son arme, que Thäan esquiva à son tour. Un sourire aux lèvres, il se lança dans une frénétique danse de cimeterres, Wakao ne put que se mettre en position de défense et tenta d'échapper à cette folie tranchante.
Wakao fit un bond en arrière, sourit a son tour et redoubla de violence à son tour. Les deux duellistes s'affrontaient avec une fluidité proportionnelle à la violence des coups portés. Rien n'aurait pu les arrêter.
Rien hormis cinq boules de couleur dans le ciel et deux loups sortant des bois aboyant à tue-tête. Les deux adversaires s'arrêtèrent d'un commun accord et regardèrent les loups puis montèrent vers les boules de couleurs.
Une violente explosion retentit dans les bois, allant jusqu'à faire trembler le sol. Les deux comparses se regardèrent et, rengainant leurs armes se lancèrent dans les bois à la recherche de Loa.
Depuis le temps qu'ils parcouraient la forêt pour chasser, ils la connaissaient de fond en comble. Ils la traversèrent et trouvèrent leur amie en un rien de temps, les deux canidés sur les talons. Elle sauta d'une branche où elle les rejoignit effrayée.
- Le village Thäan, fit elle. Le village est attaqué.
Thäan regarda ses amis et s'en fut vers le village.
- Allons-y, fit Wakao.

Drizzt

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