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Contes Spalliens : Chapitre 42 - L'odeur des machines

Franc-Champs avançait lentement dans la forêt. Les arbres de plantation étaient tous bien alignés et montaient haut dans le ciel, formant une titanesque voûte d'un vert intense, à travers laquelle filtrait l'intense lumière des tropiques. Le mage allait en ligne droite, coupant à travers les fourrés, ne suivant apparemment aucune piste.
De temps en temps, il s'arrêtait et une couleuvre, d'habitude enroulée autour de son cou, descendait le long de son bras pour humer le sol dans toutes les directions. Des fois, cette inspection se prolongeait à certains arbres ou aux odeurs ramenées par le vent. Mais rapidement, elle remontait à sa place et Franc-Champs reprenait sa route, en allant parfois vers un nouvel objectif.

Il marchait ainsi depuis plusieurs heures au sein des parcelles d'arbres quand il s'arrêta enfin à un point d'eau pour prendre quelque repos. Il défit son baluchon, posa son bâton et son arbalète lourde sur un rocher plat, son serpent descendit prendre le soleil à proximité.
Alors qu'il se penchait sur l'eau pour remplir sa gourde, un violent éclat de lumière rouge illumina la forêt. Quand la lumière redevint supportable, on ne voyait plus Franc-Champs, et une partie de la berge où il se trouvait avait fondu son l'effet de la chaleur. Cependant l'eau était encore parcourue de remous, comme si quelqu'un avait subitement plongé dans l'eau.
Un bruit de feuilles mortes se fit alors entendre au loin puis, presque sans bruit, une étrange créature, constituée d'une multitude de filaments métalliques rattachés à une tête plate, sortit de sa cachette. Se servant de ses filaments comme une grande aile, elle vint se poser sur un monticule à une dizaine de mètres du point d'eau. Elle tenait dans ses tentacules un objet oblongue, lui aussi métallique, braqué vers les remous de l'eau. Elle semblait dans l'attente, guettant des signes de vie.

Un troisième protagoniste entra alors dans l'histoire. Alors que l'oiseau barbelé guettait encore la surface de l'eau, un murmure, semblant venir de la cime des arbres, se fit soudain entendre et s'arrêta presque aussitôt. Comme si elles n'attendaient que ce signal, une dizaine de formes sombres, semblables à des tentacules de quelque calamar géant, sortirent violemment du sol et s'enroulèrent autour de tout ce qui se trouvait là. La machine réussit à presque tous les éviter, mais deux s'accrochèrent à elle, la plaquant au sol.
Elle réagit cependant rapidement et avait déjà tranché un des deux tentacules à l'aide de deux lames-fouets dissimulées dans ses filaments quand une seconde incantation, plus rauque et brutale, s'acheva. Les ombres des arbres semblèrent alors se condenser, s'intensifier, et un puissant courant d'air surgit de nulle part fonça vers l'oiseau, encore accroché par une tentacule. Il achevait de s'en défaire quand le puissant souffle l'heurta de plein fouet, le dépassa, puis commença à revenir vers lui, comme animé d'une volonté propre.

Ne pouvant découper ou brûler de l'air, la machine décolla et évita les attaques suivantes en bondissant d'arbre en arbre, cherchant à identifier la voix qui la harcelait de sorts. Celle-ci ne tarda pas à se faire entendre à nouveau, entonnant une incantation très similaire à la dernière et là encore les ombres s'épaissir, semblant donner vie à un nouveau souffle d'air agressif. Libre de ses mouvements, l'oiseau barbelé réussit cependant à repérer la silhouette sombre qui volait désormais au-dessus du niveau des arbres et se lança à sa poursuite.
Le combat sembla alors pencher du côté de la machine, car bien que plus lente que les rafales de vent, elle était trop agile pour que leurs attaques portent. Dans le même temps, même si le laser ne lui faisait rien, son adversaire semblait redouter le corps à corps et elle se déplaçait plus vite que lui.

Elminster était presque rattrapé quand il tenta un plongeon soudain vers le point d'eau. L'oiseau barbelé réagit rapidement à ce changement de direction et Elminster venait juste de se poser quand il arriva sur lui. Les quelques secondes de gagnées lui permirent cependant d'élever un soudain mur de vent entre lui et la machine, dont la trajectoire fut déviée au dernier moment. Elle frôla cependant le mage, qui redécolla avec peine, se tenant l'épaule gauche, le bras dégoulinant de sang.
C'est quand elle effectuait son demi-tour pour porter le coup fatal qu'elle se trouva nez à nez avec Franc-Champs, l'arbalète chargée et épaulée. Le carreau partit alors que l'oiseau venait de prendre un vif élan et ce dernier ne put donc l'éviter à temps. La pointe d'acier traversa une masse de filaments métalliques positionnés comme un bouclier et perfora la tête de la machine de quelques centimètres.

Comme étourdie par le coup, la machine perdit de ses réflexes et reprit son vol avec quelques maladresses, maladresses fatales quand on est poursuivi par deux élémentaux de l'air. Les puissants tourbillons la projetèrent contre un arbre. Gravement endommagée, elle tenta alors de s'enfuir en rasant le sol, se déplaçant plus vite quand elle s'appuyait sur du solide. Mais Elminster empoigna son lance-projectiles et fit feu, de même que Franc-Champs, qui avait eu le temps de recharger. Un des carreaux perça à nouveau le réseau de filaments, et s'enfonça dans la tête, causant le dégât fatal.
Lancée à pleine vitesse, et désormais sans réaction, la carcasse métallique heurta le sol de plein fouet, laissant un petit sillon de poussière. Instantanément les élémentaux d'air semblèrent disparaître dans les ombres des grands arbres.

« Ca va aller ? » demanda Franc-Champs, alors que les deux mages se rapprochait de ce qui n'était plus désormais qu'un amas de fil emmêlés.
« - Je ne sais pas trop, je pense que ça pourrait être pire. Comment diable avez-vous fait pour éviter le tir du laser ?
- L'éducation corporelle est une base de l'enseignement au Mebiffa, et mon serpent surveillait les alentours.
- Je croyais qu'il avait très mauvaise vue !
- Il a sentit l'odeur de la machine, je savais qu'elle était par là.
- Hum... Tiens, son laser semble avoir encore beaucoup de charges, il n'a pas dû s'en servir beaucoup avant.
- Ou bien il l'a rechargée avec les réserves énergétiques d'autres armes.
- C'est possible ?! »
Franc-Champs sembla un moment décontenancé, puis reprit, avec son calme habituel :
« - Je pense. Vous m'avez dit que c'était des charges d'électricités contenues dans des solutions de produits chimiques. On peut certainement transférer les produits chimiques d'une arme à l'autre.
- Pourquoi pas. »
Sur cette phrase, Elminster leva le bras droit en l'air et prononça quelques mots brefs, une colonne de lumière, à peine visible en plein jour, apparut, indiquant leur position.
« Ce ne sera pas suffisant. » Franc-Champs prononça lui aussi quelques mots magiques et une lumière particulièrement vive apparut au sommet de la colonne. « Ca devrait être mieux. »
En attendant, Elminster défit sa manche et commença à nettoyer la plaie avec de l'alcool, tandis que Franc-Champs allait rechercher ses affaires. Ce dernier effectua alors un bandage sommaire.
Ils passèrent ensuite quelques temps à étudier la machine, essayant surtout de voir les points faibles de la carapace ou d'autres points faibles éventuels.

Au bout d'une petite heure, un détachement de soldats fédéraux arriva sur les lieux en compagnie d'un mage de combat. Ce dernier invoqua alors un disque flottant pour transporter le corps, tandis qu'un soldat reprenait le bandage d'Elminster.
Puis toute la troupe prit le chemin du retour.

Dvorak

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