Autrement... : Partie 9 - Les liens du sang

Lorsque Jordan arriva dans les locaux de l'hôpital, le lendemain, il fut sorti de ses pensées par deux jeunes filles d'une quinzaine d'années qui l'attendaient pour lui demander un autographe. Il le fit avec plaisir et se demanda si ce n'était pas le moyen de faire changer les mentalités. Il chassa ces pensées sans importance d'un hochement de tête et se dirigea vers la chambre de Julian et de Thomas. Lorsqu'il arriva dans le couloir de pédiatrie, il prit un peu de temps pour discuter avec le médecin des enfants. L'opération qu'il avait menée conjointement avec Vincent et Stéphane avait, semble-t-il, ouvert une voie vers un possible soin des comas dus au mal de l'Eveil. Il fut heureux d'entendre cette bonne nouvelle. Le médecin lui demanda s'il connaissait un ancien élève de l'Université qui pourrait venir travailler sur le sujet avec les médecins du Centre, et Jordan lui promit de lui faire parvenir une liste au plus vite.

Des éclats de voix provinrent alors d'une salle de repos où Vincent était installé avec deux personnes, Jordan supposa que c'était les parents de Julian et Thomas.

- Comment prennent-ils cela ?
- Aussi mal qu'hier, répondit le médecin. Je n'ai d'ailleurs toujours pas compris pourquoi. Nous avons réussi à sauver le plus jeune et il nous a permis de trouver une solution pour une grande partie de nos autres patients. C'est très positif.

Le médecin s'arrêta voyant que les yeux de Jordan étaient rivés sur le visage des deux parents.

- D'après ce que je vois, le père ne veut plus concevoir ces "créatures du diable" comme ses enfants. Je crains que ça ne finisse très mal.
- Qu'est-ce que...
- Je lis sur les lèvres. Ca n'a rien de magique.

Dans la petite pièce, la mère enfouit son visage dans ses mains. Le père se leva d'un bond, faisant tomber la chaise, et sortit d'un pas rapide.

« Faites donc ce que vous voulez de ces monstres ! » ajouta-t-il au moment où il claquait la porte derrière lui.

Il prit la direction de la sortie sans regarder autour de lui. Jordan se dirigea vers la petite salle, frappa à la porte vitrée et entra sans attendre de réponse.

« Madame, je vous présente mon ami et collègue Jordan. »

La femme lui tendit la main. Son visage, qu'elle venait de découvrir, était couvert de larmes.

- Merci... Merci beaucoup de les avoir sauvés tous les deux.
- Je vous en prie, Madame, c'était la moindre des choses.

Elle ferma la bouche et partit dans un gémissement. Elle tremblait légèrement, semblant chercher un moyen pour que ce cauchemar s'achève. Jordan prit un siège près d'elle. Il lui laissa un moment pour se remettre.

« Y a-t-il une chance pour que votre mari revienne à des conceptions plus proches du bon sens ? »

Elle tourna finalement la tête vers lui. Elle avait les yeux rougis, et Jordan y décela un désespoir qui ne voulait rien dire de bon.

- Aucune, il fait partie d'une ligue Anti-Eveillé, pour lui c'est le pire des affronts.
- Remarquez, sa réaction prouve qu'il n'a pas de raison d'avoir des enfants comme Julian et Thomas. Ils ont tous les deux été très courageux. Ce qui me fait le plus mal, c'est qu'après le calvaire qu'ils viennent de vivre, il va falloir leur dire qu'ils n'ont plus de famille.

Le ton de Jordan était plus dur.

« Je ne compte pas les abandonner, je ne suis pas une politicienne extrémiste et ce sont mes enfants. »

Le sursaut de la petite femme qui semblait perdue dans son tailleur Chanel fit apparaître un sourire sur les lèvres de Jordan. Elle comprit qu'il savait parfaitement qu'elle réagirait comme cela.

- Je suis certain qu'ils peuvent compter sur vous, mais je préférais vous l'entendre dire. Je sais aussi que s'ils restent en présence de votre mari, ils sont en danger et vous en êtes consciente.
- Je ferai ce qui s'impose, finit-elle par dire avec un regard plus déterminé.

Jordan se leva, la salua et sortit de la pièce pour visiter les jeunes convalescents.