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Contes Spalliens : Chapitre 09 - Voyage d'affaire.

Après son rendez-vous avec le jeune empereur, Pacohol profita de sa présence à Wrax pour aller faire les courses. Après tout, on y trouvait de tout, si on avait de quoi payer et, rajout de Pacohol, si on avait les bons contacts. Cela était particulièrement vrai pour les ingrédients de la haute magie, qui sont souvent si rares que même une quantité illimitée d'argent ne suffit pas. Mais après plusieurs années de négociations, Pacohol savait que si lui n'obtenait pas quelque chose, c'était que cette chose n'était pas disponible : il avait une bonne connaissance du terrain, une bonne réputation et beaucoup de savoir-faire. Y compris quand le propriétaire ne voulait pas se séparer de son bien. Pacohol appelait ça un don forcé pour la bonne cause.
Aujourd'hui cependant rien de bien compliqué : juste quelques épices, des herbes exotiques, une grosse commande de faux Mithril et autres métaux rares pour le Cratère, un rapide coup d'oeil chez les armuriers, au cas ou ils auraient quelque chose d'intéressant et une vérification de l'état d'avancement des arsenaux militaires. Ces derniers étaient impressionnants, et le niveau de perfection des navires wraxiens ne cessaient d'augmenter. On parlait d'ailleurs d'essais portant sur des navires à système de pression centrale, qui faciliterait la mise en batterie des pièces d'artillerie et augmenteraient les cadences de tirs.
Déjà que la mise en place des herses avait rendu les forteresses flottantes et volantes quasiment inattaquables, si en plus on augmentait leurs cadences... Pacohol en arrivait à se demandait qui des arsenaux de Wrax ou du Cratère en était au plus haut point, mais, rapidement, il répondait lui-même à la question, on ne pouvait faire mieux que la Pointe de Foudre. Ce qui aurait été plus intéressant aurait été une entraide entre les deux. Mais ce n'était pas possible.

Une fois les commandes passées, Pacohol se rendit au port militaire et emprunta la porte. Officiellement, il n'était venu que pour les achats, pas pour espionner ni pour parlementer, et personne ne se doutait de rien tandis que les gardes, surpris de voir un extérieur emprunter une porte, vérifiaient ses paquets. Sans trop de zèle toutefois, ce n'était que pour la forme.
Les portes en elles-mêmes étaient destinées à faciliter les téléportations, les rendant sans danger entre elle, doublant leurs chances de réussite vers un point quelconque. C'était un système ancien, mis en place par les Elfes avant même la venue des hommes, et personne ne savait exactement combien et où on en trouvait, surtout que Wrax et Citadelle continuaient à en construire de nouvelles, comme celle du port, qui possédait des sécurités assez efficaces, notamment celles qui en empêchaient la localisation.
L'avantage de ce genre de transport, c'était que personne ne pouvait le suivre, ce qui aurait pu être drôle, remarquez.
Il arriva directement chez lui, à Sima, la ville la plus proche de Ris et du Cratère, et donc la mieux défendue de l'empire Spallien. La maison en elle-même n'était pas à lui, mais a son beau-père, Lothar, commandant en second des forces Spalliennes, qui passait la majorité de son temps à Ris même. Quant à sa femme, elle l'attendait.
« - Chéri, la journée s'est bien passée. » Ce n'était pas une question, Nessie connaissait tout ce qu'elle voulait, sur tous les sujets du présent ou du passé. Il lui suffisait de se poser une question pour avoir la réponse, même si elle ne comprenait pas les deux. Sa seule existence expliquait le fait que Spalle n'ait pas été anéantie. Elle était, au sens propre, un don des Dieux. Pour l'heure actuelle, elle faisait la cuisine ; il faut bien s'occuper les mains.
«- Vraiment aucun problème ?
- Non, vraiment rien à noter, rien de nouveau en tout cas, même ailleurs dans le monde. Je suis contente que l'empereur ne t'es pas fait attendre, comme ça tu as pu m'acheter ce que je t'avais demandé.
- Tu n'as pas passé la journée a me surveiller quand même ?
- Non, bien sûr, j'ai eu mon lot de questions importantes. Je me suis juste demandée si tu allais bien, c'est pendant la cuisine que je me suis renseignée sur les détails.
- Ah ! Tu ne me surveilles plus en permanence pour vérifier que je n'embête personne (accentuez le 'e'). Tu fais des progrès !
- Arrête de me charrier, je ne faisais ça qu'au tout début, et puis que je le sache en direct ou plus tard, ça ne change rien, je t'engueulerai quand même à l'arrivée. Par contre toi, ça ne t'inquiète pas de me laisser toute seule ? (changement de ton) Si bien sûr, mais je dois faire le travail que l'on m'a confié, gnagnagna...
- Tiens, puisse que tu penses au boulot, où en est le médecin de Wrax, il n'a toujours aucun problème sérieux ?
- Non, depuis l'intervention de Nina, il a réussit à semer ses poursuivants. Il arrivera à Principatus sous peu et de là devrait prendre un dirigeable rapide pour Wrax. J'espère vraiment que rien ne lui arrivera.»
Pacohol aussi. Il voulut un moment poser des questions au sujet des autres passagers du bateau qu'avait pris le médecin jusqu'à Haute-Cîme, mais il se dit qu'on ne pouvait surveiller tout le monde comme ça. Même Spalle était un sujet trop vaste pour tout en savoir. Il valait mieux se concentrer dessus. Par la suite il allait oublier ces autres passagers, jusqu'à ce qu'on réentende parler d'eux.

En un sens, être le mari de Nessie était un boulot à plein temps. C'était à lui de surveiller son humeur, sa santé, etc. . Sans elle, Spalle ne pourrait répondre efficacement aux multiples dangers qui la menaçait. Mais lui ne le prenait pas comme ça, quand on aime, on ne compte pas. Son vrai boulot était de coordonner les opérations extérieures de Spalle, qui devaient rester les plus discrètes possibles. Lui-même allait sur le terrain quand on avait besoin d'un officiel et que Nina n'était pas libre. Et c'était souvent le cas, Nina n'était pas vraiment douée mais elle était obstinée, déterminée, quelque chose de difficilement croyable, du genre à avoir vaguement entendu parler de vacances, et qui trouvait l'idée intéressante, pour quand elle aurait le temps.
Et elle était unique. C'était, en quelque sorte, une réfugiée. Mais certainement la seule volontaire de toute la guerre, qui durait pourtant depuis plus de deux mille ans. De plus, elle semblait savoir beaucoup de choses auquel même Nessie n'avait pas accès, des choses essentielles et futiles en même temps. A vrai dire si Marcelle (Pacohol appelait l'ancienne impératrice par son prénom car c'était une de ses amis) avait été le moteur des changements, Nina en était la cause. C'était une habituée de la pensée transversale, et peu de personnes aurait pu abandonner son humanité comme elle.

Dvorak

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