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Nels : Histoire d'un mage sans passé : Chapitre 17

J'étais de nouveau lancé dans une nouvelle quête un peu spéciale, bien que cette fois ci je n'aurai pas à cacher mon identité, au contraire, celle ci était la base même de la mission que j'accomplissais pour l'Académie. Le Royaume des Hauteurs avait un grand respect pour les Mages de l'Académie, et savoir qu'on aurait besoin d'eux serait un plaisir. Le voyage n'en serait pas moins long de toutes les manières, et me laissait un peu seul avec mes pensées. Durant mon sommeil, suite à la tornade élémentaire, j'avais eu pas mal de visions fragmentaires fort effrayantes, des visions d'horreur et de souffrances, et un nom résonnait dans ma tête : Alarkhan. Je me doutais que c'était dû à la douleur ressentie due au drain de vie, et au fait que la puissance de Vahirn était loin d'être négligeable. Pourtant lors de cette bataille le nom du plus grand Sombre n'avait été que mentionné, et encore. Ca devait être sans aucun doute une réminiscence de ma vie passée, avant ma perte de mémoire. Il suffisait de se dire que avant je ne devais pas être mage et que c'était une de mes grandes peurs : le fait de pouvoir mettre un événement sur le compte de ma vie passé me rassurait. Pour ce qui était de Naëria, par contre, je n'arrivais pas du tout à expliquer ce qui se passait. Il était vrai que j'avais beaucoup d'affection pour elle, et il était vrai qu'au cours de ma formation d'Académicien nous avions appris à mieux nous connaître. Cependant, comment peut on prétendre connaître quelqu'un qui n'a aucun souvenir de son passé ? Moi même je ne savais pas du tout ce que j'étais avant mon réveil dans cette chambre où Bardéak me parla la première fois. D'après ce que certains racontaient à l'Académie, j'étais arrivé dans un drôle d'état, une sorte de momie entourée de bandages apportée par Basaïn. C'était Verden qui m'avait soigné, et le reste de mon histoire m'était connu. Certains prétendaient que Basaïn ayant peur de se retrouver avec un nombre décroissant de recrues avait décidé d'enlever quelqu'un...
Lors du futur Grand Conseil, je mettrai sûrement la question sur la table, qui sait ce que j'ai été et l'influence de mon passé sur mon futur, d'autant plus qu'un grand nombre de dirigeants des Grands Royaumes devaient me faire confiance, sans compter les petits Royaumes qui dépendaient en quelque sorte d'eux : un peu comme Mithland s'était inspiré de Licht pour ce qui était de son administration. Pour ce qui était du Royaume des Hauteurs, on m'avait un peu parlé de son histoire, un peuple qui avait dû apprendre à se défendre seul face à des Trolls des montagnes et autres créatures fort peu avenantes à proprement parler. Ils avaient une capitale que peu de gens avaient vue, située sur les hauteurs bien sûr mais à une altitude démesurée ; d'ailleurs ceux qui l'avaient vue étaient étonnés de la magnificence de la ville en comparaison de la rudesse de l'environnement. Les dirigeants de ce Royaume étaient tous des érudits capables, qui avaient un sens de l'honneur particulièrement fort et allaient jusqu'à sacrifier leur vie pour accomplir leurs missions. Nous aurons besoin d'hommes dans ce genre là à travers les années futures, l'avenir étant de moins en moins glorieux d'après ce que nous voyons autour de nous.

Cela faisait tout de même cinq jours que je voyageais, non pas au grand galop mais à un rythme soutenu. Je m'étais arrêté dans de petits villages où je pus acheter quelques vivres et voir un peu l'étonnement des enfants devant ma tenue qui était fort différente de ce qu'ils avaient l'habitude de voir. La vie de ces gens, considérée dans certaines grandes villes comme trop simpliste ne me laissait pas indifférent, le fait de pouvoir vivre de son travail, de voir pousser ou croître sa nourriture, pouvoir donner à ses enfants la valeur du travail fourni et leur apprendre le travail au fur et à mesure de leur croissance. Bien que l'érudition ne soit pas leur principale préoccupation, le grand livre de la Nature leur apporte toute la connaissance nécessaire à leur vie heureuse.

J'arrivai peu à peu dans une région de collines, d'où je pouvais voir les contreforts des hautes montagnes recouvertes de leurs neiges éternelles. La végétation qui était luxuriante dans les plaines des alentours commençait à se raréfier, la terre m'apparaissait de plus en plus rude et le chemin devenait caillouteux. J'en étais tout de même à mon septième jour de voyage, et je commençais à être fatigué d'avoir autant chevauché, et la vue de huttes au toit de paille sur les contreforts de collines rocailleuses m'annonçait mon arrivée dans le Royaume des Hauteurs. C'était sans doute un petit village pensais je jusqu'à ce que je vois les soldats autour de celui ci : il s'agissait d'un poste avancé de Gardes Frontières. J'avançai vers eux et m'annonçai :
- Messieurs, bonjour.
- Bonjour voyageur. Qu'est ce qui t'amène sur cette route?
- Je suis Nels, Grand Maître de l'Académie. Je voudrais voir le responsable ici.
- Le Cacique vous voulez dire?
- C'est comme cela que vous appelez donc votre chef?
- Oui... mais ne restez donc pas là en dehors du village. Entrez, voyageur, que nous avertissions le Cacique.
- Merci beaucoup ...

En entrant dans le village, je vis au loin un grand feu, autour duquel des femmes étaient assises avec des enfants. Les vêtements de ce peuple sont très colorés, rouges, verts, bleus, et semblent tissés dans une laine plus fine que celle du mouton. Les gardes portent une sorte de couverture noire percée d'un trou à travers lequel ils passent la tête, et cette sorte de couverture semble être fort lourde au vu du fait qu'elle tombe droit et ne plisse pas. Les gardes qui m'avaient accueilli se sont précipités vers une des huttes circulaires et en ressortirent avec un homme dont la fameuse couverture était noire mais comme brodée de fils dorés. Il s'avança vers moi et me dit :
- Que mon Seigneur pardonne notre impertinence, mais mes gardes ne savent pas grand chose des affaires de l'Académie. Maintenant, si vous voulez bien venir avec nous, vous pourrez vous reposer et manger quelque peu : votre voyage a dû être très long.
- En effet Cacique. J'accepte avec joie votre invitation.

Un des gardes prit les rênes de mon cheval et le mena vers un autre endroit du village. Le Cacique semblait être un homme qui, bien que plus âgé que les autres, était dans la pleine force de l'âge. Seuls quelques cheveux gris trahissaient son expérience, ainsi que sa connaissance de l'Académie. Nous passâmes devant le groupe de femmes qui étaient là, et il leur demanda de préparer un bon dîner pour le soir même. Il me conduisit ensuite vers la hutte d'où il était sorti.
- Mon cher Seigneur, je vous offre ce que j'ai et j'ai conscience que c'est bien peu.
- Ne vous en faites pas Cacique, je ne viens pas pour profiter de vos ressources.
- L'heure doit être bien grave pour qu'un Grand Maître lui même se soit déplacé. Je ne connais l'existence des Grands Maîtres que grâce à ma formation de Cacique vous savez...
- Je vois que vous êtes perspicaces. Vous devez connaître aussi le culte Sombre?
- Le culte interdit? Nous autres, peuple des Hauteurs, aimons plus que tout la lumière et la vie que nous donne Pachamama... notre mère la Terre dans nos dialectes... je ne peux que haïr ce culte.
- Je comprends, mais le problème vient du fait que dans d'autres villes et Royaumes certains n'ont pas le même point de vue que vous. Il y a eu de nombreux incidents...
- Nous sommes un peu au courant : il y a peu de temps un de nos bas villages comme celui ci a été sauvagement attaqué de nuit. Il a été totalement dévasté. C'est une des patrouilles qui surveillent chacun des villages qui a trouvé le charnier... Un de ces hommes est devenu fou en voyant le spectacle horrible d'hommes, de femmes et d'enfants atrocement mutilés et certains décomposés, un peu comme s'ils étaient morts depuis des années.
- Donc vous connaissez aussi bien que moi les dangers de ce culte. L'Académie a des raisons de penser que quelqu'un veut réunir une grande armée de Sombres dans un but de conquête.
- Bien dans ce cas je pense que vous voudrez en référer aux autorités supérieures? Je vais vous donner des hommes qui vous emmèneront vers une garnison plus haute dans la montagne. Vous n'aurez aucun mal ensuite à être guidé vers notre capitale. Pour le moment il s'agit donc de manger un peu, il n'est pas question que vous défaillissiez en route à cause de moi.

Nous ressortîmes, le soir n'était pas encore tombé mais les femmes étaient dans une activité fébrile : l'une d'entre elle était en train de creuser la terre et en ressortait des espèces de tubercules couverts encore de poussière qu'elle jetait dans une casserole pleine d'eau après les avoir bien époussetés. Une autre cueillait des sortes de fruits rouges poussant sur une petite plante grimpante. Les odeurs de cuisine étaient complètement différentes de ce que j'avais pu voir jusque là, elles commençaient aussi de découper de grands morceaux de viande séchée, et le Cacique m'annonça que le dîner serait bientôt servi. Environ une demi heure plus tard, j'étais assis sur une sorte de natte bariolée dans la hutte du cacique, une assiette en terre cuite contenant les fameux tubercules bouillis, accompagnés des fruits rouges qu'elles avaient cueillis. Ce fruit semble être très juteux, et je ne me pose pas de question : même si je n'ai pas l'habitude de ces aliments ci, j'ai grand faim et après tout ils mangent bien ça tous les jours je ne vais pas en mourir... Le Cacique m'amène en plus des morceaux de la viande séchée qui semble avoir été réchauffée au dessus du feu : ces tubercules qui semblaient poussiéreux sont délicieux, et les fruits rouges, appelés par mon hôte les Tomatl, accompagnent admirablement le met. Une fois que nous finîmes de manger, je ressortis de la hutte à l'invitation du Cacique qui tenait à me montrer quelque chose. Au dehors, les hommes de la garde qui étaient de service durant la journée s'étaient réunis autour du feu et racontaient aux enfants les légendes du pays des Hauteurs, des légendaires héros anciens, et du Grand Oiseau : le Condor. D'après ce qu'ils racontaient aux enfants, cet oiseau a une envergure immense, plus grande que deux hommes avec les bras tendus se tenant par la main. Il vole très haut dans le ciel, aussi haut que les plus hautes montagnes et surveille sans relâche les activités des hommes. L'un d'entre eux sort un ensemble de roseaux attachés les uns aux autres et commence à souffler dedans : un doux son dû sans doute à la vibration de l'air dans le roseau se répand, il joue une mélodie qui accompagne le récit de l'un d'entre eux. Le son est résolument triste, mélancolique... mais résolument joyeux et optimiste : malgré les problèmes, toujours le Condor aide l'homme à survivre... Et la montagne qui est si rude n'est autre que l'endroit où l'on vit, preuve indiscutable de la détermination du peuple des Hauteurs. La soirée dura tard, puis chacun rentra sous sa hutte. Le Cacique m'offrit de dormir dans la sienne, si les espaces restreins ne m'effrayaient pas trop. J'acceptai avec joie...
La nuit fut courte, et au lever du soleil j'étais déjà prêt à reprendre la route. Le Cacique ordonna à trois hommes de m'accompagner à la forteresse dont ce bas village dépendait. Il me conseilla de laisser là mon cheval, car la rigueur du voyage l'épuiserait de trop. Nous irions à pied et ce seraient des mules qui porteraient nos bagages. Nous allions donc vers la forteresse de Pallka, qui était distante d'une longue journée de marche. Je ne compris pas de suite la grimace de mon escorte lorsqu'ils surent qu'ils iraient à Pallka, mais je ne tardai pas en prenant la route... La dénivellation était impressionnante pourtant le sentier serpentait le long de la paroi, sans jamais avancer face à elle. Les mulets lourdement chargés eux semblaient avancer avec plus de facilité. J'étais étonné de l'altitude que nous avions pris en à peine deux heures de marche et ce à un rythme de pas très rapide, et la route semblait monter encore et encore. Au milieu de la journée, nous nous arrêtâmes et mangeâmes un peu de viande séchée avec une sorte de pain, l'un des gardes avait pris sa flûte faite de roseaux et ne tarda pas à en jouer, pour se détendre sans aucun doute. Nous avions une vue splendide sur la vallée en contrebas, le bas village paraissait vraiment petit...
Quelques minutes plus tard, nous reprenions notre route sur ce sentier qui bien que caillouteux, paraissait tracé par quelqu'un et entretenu vu que nous restions sans cesse sur une sorte de trace prédéfinie qui évitait les parties où la roche semblait trop abrupte pour être traversée en biais... J'étais assez impressionné et j'imaginai sans aucune peine le dur labeur des constructeur de ces routes. Au soir, nous arrivions sur un piton rocheux et je n'en crus pas mes yeux : lorsqu'on m'avait parlé de la forteresse de Pallka, je pensais à quelques huttes un peu plus solides et au mieux à une palissade. En voyant la pente, je me demandai même comment ils pouvaient transporter ne serait ce qu'un tronc mais j'avais face à moi un vrai fort, avec de lourdes murailles en pierre taillée, sûrement arrachées directement à la montagne. Les portes étaient en fer, mais incrustées d'or représentant un immense oiseau, ainsi que le soleil. Des gardes avec la fameuse couverture étaient aux portes et ils me regardèrent un peu bizarrement avant de savoir que c'était le Cacique du bas village qui m'envoyait. Ils me laissèrent alors entrer dans la forteresse.
Elle était grande vue de l'intérieur, et des dizaines de huttes étaient bien alignées, dans un ordre parfait. En fait nous avions sûrement pénétré dans la ville par sa partie basse, elle semblait s'étendre sur un versant à la pente moins accentuée. Le soleil couchant me fit remarquer un drôle de détail : le chaume des toitures semblait être mêlé à de l'or, au vu du brillant des huttes. Un des gardes me dit :
- Nous allons chercher notre Seigneur, le Quechua...
- Bien si c'est ainsi que vous nommez vos seigneurs...
Un homme venait à moi, vêtu lui d'une de ces couvertures brodée magnifiquement de fils d'or et aussi de fils d'argent. Il s'adressa à moi en inclinant la tête :
- Que me vaut le grand honneur d'accueillir ici un Grand Maître ?
- Quechua, je viens en tant que messager. On m'a dit que tu pourrais me mener vers le Roi...
- Vers notre Inca? Je vous y mènerai personnellement. Prenez néanmoins quelque repos : le voyage depuis le bas village a dû être fatiguant.

Nous nous dirigeâmes vers le sommet du versant, et je vis une sorte de palais, rehaussé sur un remblai de terre, comme pour dominer encore plus la ville. Le palais était imposant, le fait même qu'une aussi grande ville ait pu être construite à cette altitude m'impressionnait. Le Quechua sembla s'en rendre compte et me dit :
- Chaque jour qui passe, je rends hommage à mes ancêtres pour leurs réalisations... Nous avons nous aussi dû construire et je me suis rendu compte de leur génie quand j'ai utilisé les techniques qu'ils avaient mis au point.
- Et pour ce qui est de vos armées ? Paraît il vous affrontez relativement souvent des Trolls...
- En effet. Nous sommes après tout sur leur territoire mais nous pouvons nous vanter de l'avoir amélioré grandement.
- Je vois aussi que l'or est un métal que vous utilisez énormément.
- Nous avons d'immenses mines d'or, et le travail ici est collectif : tout le monde peut travailler dans un secteur différent chaque mois. Au fur et à mesure, chacun acquiert une grande connaissance de tous les métiers de la ville, et chaque fois que les ouvriers travaillent à la mine, ils récupèrent un peu d'or et embellissent leurs habitations. Nous rendons ainsi hommage au soleil, en reflétant bien qu'imparfaitement sa lueur.
- Je me demande comment vous pouvez avoir de la nourriture... Vous vous la faites porter depuis les plaines ?
- Je vais vous montrer mais avant il vous faut du repos. Ensuite nous dinerons et demain je répondrai à vos questions.
- Il me faut voir l'Inca au plus vite.
- Je vous accompagnerai moi même mais après demain seulement. Cela nous prendra environ deux jours, nous nous arrêterons à une des forteresses militaires de l'Empire, Sacsayhuaman.
- Vous dites?
- Sacsayhuaman est une de nos garnisons. Vous y rencontrerez peut être certains de nos généraux. Je suppose que la visite d'un Grand Maître en personne ne présage rien de bon, non pas que ce soit de votre faute, loin de moi cette idée, mais nous savons que vous prenez soin de prévenir le pire.
- Vous êtes sage, Quechua, je ferai comme vous l'avez dit.

Nous nous installâmes pour le dîner autour d'une table. Il y eut plus de viande que chez le Cacique du bas village, mais aussi avec les "papas" et les "tomaltl" des graines jaunes comme l'or, les graines de "maïs", et il me servit aussi une soupe avec des graines de toutes les couleurs, que je ne reconnus pas de premier abord mais qui étaient en fait des haricots, qu'il appelait "porotos". Tout en mangeant, nous écoutions un petit orchestre se servant des fameuses flûtes en roseau, ainsi que de tambours avec une membrane à la peau non tannée, c'est à dire que les poils de l'animal étaient encore dessus. Ils utilisaient aussi une sorte de petite guitare à la sonorité fort aiguë.
J'écoutais un peu la musique joyeuse que jouait ce petit orchestre privé et regardais au dehors. Les serviteurs du Quechua commencèrent à allumer de petits braseros tout autour de la maison, et à boucher les ouvertures des murs avec des panneaux de roseau. Tous de suite, la température à l'intérieur de la maison remonta quelque peu, et nous pûmes ainsi boire du "chocolatl", boisson faite avec des fèves brunes. Je la goûtai, c'était quelque peu amer mais en y ajoutant du sucre on obtient une boisson fort agréable au goût.
J'allai me coucher, l'estomac bien rempli, et en repensant à ce que je devrais dire à l'Inca. Je n'ai pas vraiment eu le temps de penser, je m'endormis aussitôt.
Le lendemain matin, je me réveillai tard, et su par les serviteurs que le Quechua travaillait sur les affaires courantes en attendant que je sois prêt pour la visite de sa ville. Pallka s'étendait en contrebas du palais et une certaine agitation semblait s'être emparée de la population. Ils allaient et venaient, vêtus de leurs sortes de couvertures bigarrées et se rendaient à leurs tâches quotidiennes. Je sortis de la chambre qui m'avait été attribuée, et vis le Quechua qui semblait juger une affaire. En me voyant il se réjouit :
- Je viens de finir la dernière affaire du jour. Je vais vous faire visiter un peu la ville, et vous montrer nos champs.

Je me mis en marche derrière lui et nous allions vers l'Ouest de la ville. Je remarquai que la pente de la montagne ne me paraissait pas moins raide par là, mais que le soleil inondait littéralement le versant. Je vis alors une forme d'escalier monumental, immense, qui s'étendait sur des centaines de mètres. Il ressemblait à une fourmilière avec des gens qui travaillaient sur ses marches. Il m'expliqua que la culture en terrasses était vitale pour retenir l'eau nécessaire aux cultures, et pour faciliter la récolte. Ils cultivaient ainsi les légumes que nous avions mangés la veille. Je passais la journée à visiter les divers temples et monuments à l'Inca de la ville, notamment le Grand Cadran qui indiquait la saison grâce à des encoches sur un mur atteintes par l'ombre d'une petite colonne. Le soir se passa comme le jour précédent, on mangea et nous couchâmes plus tôt car le voyage allait être éprouvant.

Le convoi était prêt, mais nous n'avions pas de mulets... Il y avait un drôle d'animal velu, avec un long cou, et qu'on chargeait de nos bagages. Je n'en avais pas vu de tout mon voyage et ces animaux me parurent très étranges.
- Ce sont des "llamas", Seigneur. Ce sont eux qui nous aideront à tout porter, me dit le petit garçon qui en tenait un.
- Mais on ne les charge pas beaucoup... Pourquoi pas des mulets ?
- Les mulets aiment pas l'altitude, Seigneur.
- Hé oui mon bon Seigneur, dit alors le Quechua, nous nous rendons d'abord à Sacsayhuaman, qui est très haute, et ensuite nous irons voir la capitale, le Vieil Oiseau, Matchu Picchiu.

Je n'avais plus aucun doute, le Royaume des Hauteurs méritait bien son nom. Le Quechua avait toujours sa couverture sur lui, et touchant ma cape il me dit :
- Vous allez geler avec ça sur le dos... Mettez donc un "poncho". Ca va vous tenir au chaud.
Il me tendit l'une de ces couvertures, elle aussi brodée comme la sienne, que j'enfilai vite afin de partir au plus vite vers la garnison. Le soleil commençait à se lever, et je quittai déjà Pallka, la cité aux toits d'or.

Nels

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