Nels : Histoire d'un mage sans passé : Chapitre 06

La bataille s'était heureusement bien finie. Nous avions avec Bardéak réussi à enrayer leur attaque. Le jour se levait et nous vîmes au loin arriver une grande nuée de corbeaux. Leur petit déjeuner était servi, et ils ne tardèrent pas à passer à table.

- Bardéak, pourquoi est ce qu'ils ont tous parlé d'un certain Alarkhan ?
- Cet Alarkhan est une vraie légende chez les gens du Sombre. Il est en quelque sorte le plus puissant d'entre eux, certainement l'un de ceux qui ont réussi à vivre les plus vieux. On dit qu'il est suffisamment cruel pour faire passer tous ses sbires pour des enfants de choeur. Ce qui m'inquiète c'est que on l'a déjà annoncé mort plusieurs fois, dont une fois il n'y a pas si longtemps. Il est très fort, j'ai déjà vu les ravages qu'il pouvait faire lorsque j'étais encore un enfant : ces atrocités sont une des raisons qui m'ont poussé à devenir un mage.
- Vous pensez qu'il peut être éliminé ?
- Tout être vivant peut mourir, cependant Alarkhan semble vivre beaucoup plus longtemps que la normale, d'autant plus que c'est un Humain à ce qu'il paraît. Il faudrait que je regarde le rouleau qu'Althor t'a montré. J'aime de moins en moins la tournure des événements actuels, et les autres Maîtres de l'Académie doivent en être informés.
- Par contre nous n'avons pas pris la direction de la grotte, nous allons perdre la barque.
- Ne te soucie pas d'une simple barque. Nous risquons bien plus gros si mes craintes sont fondées.

Nous arrivâmes très vite à Greyport, et ce fut une vraie joie de voir l'animation matinale de cette petite ville. Nous avions sauvé tous ces gens et personne ne vit passer ces deux hommes vêtus de capes sombres que nous étions. Je n'avais rencontré Althor qu'une fois, à l'auberge des Marins, mais je ne savais pas où il vivait. Bardéak semblait quant à lui se repérer à la perfection et nous arrivâmes à la porte d'une grande bâtisse. Des hommes montaient la garde à l'extérieur, et nous nous fîmes annoncer. On nous guida vers Althor.

- Mes amis quelle joie de vous voir, dit il d'une voix tremblante. Nous sommes de plus en plus inquiets de cette histoire du culte Sombre.
- Althor! rugit Bardéak, pourquoi n'as tu pas contacté l'Académie directement ? Tu as cru qu'un élève seul aurait pu vaincre seul les Sombres ?
- Seigneur Bardéak, je vous en prie, vous savez à quel point nous sommes inquiets pour les gens de notre brave ville, moi ainsi que les autres membres du concile de Greyport. Nous ne voulons pas que les gens de notre communauté...
- Découvrent que les chers membres du concile les ont installés sur une terre dangereuse Althor ? l'interrompis je. Nous savons vous et moi, ainsi que Bardéak, que les Sombres étaient en droit de réclamer leurs terres sacrées. L'appât du gain a été trop fort pour votre famille, ce n'est que juste punition que vous soyez effrayés.
- Non! Vous ne pouvez condamner toute une ville, pleurnicha Althor, nous vous paierons pour ce travail.
- Dans ce cas, poursuivit Bardéak, donnez à ce Maître d'Académie son du. Et nous ne refuserons pas un bon repas.
- Mes seigneurs, je vous emmène à l'auberge des Marins, le vieux Jack sera content de voir le jeune homme.
- Jeune homme qui sera pour vous le Seigneur Nels, je vous rappelle que vous devez respect aux Maîtres de l'Académie.

Ca me faisait tout de même bizarre que d'être appelé Seigneur. Je ne me rendais pas encore compte des événements de cette nuit là. J'avais tué pas mal d'Humains, d'Elfes, de Nains bref je m'étais montré un adversaire cruel et sans pitié. C'est la première fois dans ma nouvelle vie que je tue, même si ce sont des Sombres. Lors de mes cours de Vert, avec Naëria, nous avions évoqué la possibilité que je tue. Elle était douce mais ce n'était pas pour cela qu'elle n'était pas une guerrière redoutable, utilisant une épée longue et très fine. Il nous arriva quelques fois de faire quelques duels, mais rien de bien méchant. L'évocation du fait que je puisse tuer me laissait toujours dans un drôle d'état mais elle avait le don de me réconforter de sa voix cristalline :
- Tu n'es pas homme à tuer pour le plaisir Nels, je sais que ton coeur est bon. Cependant, les mages de l'Académie ont pour fonction de défendre ceux qui les entourent et il arrive que nous devions nous battre. Je sais déjà que tu sais te battre, même si tes épaules en souffrent, ajouta t'elle en riant.

Ce genre de discussions avec elle me manquaient singulièrement, surtout à des moments comme celui-ci. Maître Verden m'avait initié au Vert à travers ses cours en groupe, Naëria me fit devenir un expert. Autant l'art de repérer des flux vitaux et de savoir les interpréter, les cours de connaissance des plantes et des animaux me furent utiles, autant la connaissance profonde de l'esprit du Vert par Naëria me fut bénéfique.

Nous étions en chemin vers l'auberge des Marins, et Bardéak semblait plus que soucieux. Lors de notre visite à Althor, il en avait profité pour récupérer le fameux rouleau de la stèle, et son visage changea du tout au tout. Nous arrivions à l'auberge, et Bardéak demanda à Althor :
- Le repas vous nous le paierez un autre jour. Partez et nous vous contacterons si nous avons besoin de vous.
- Bien mes seigneurs, je vous souhaite bon appétit.
Jack nous vit entrer, et ce fut avec son éternelle bonne humeur que nous fumes accueillis :
- Revoila Nels l'homme en noir, et qui plus est avec un camarade. Allons bon je vais devoir en dorloter deux ce coup ci...
- Jack, nous voudrions un copieux repas, bien arrosé et dans le petit salon à l'écart des gens trop curieux s'il vous plait, lui demandais je.
- Pas de problème pour mes seigneurs. Ils m'ont l'air bien fatigués, et je pense que je peux au moins soulager leur faim et leur soif. Venez donc vous installer.

Une fois installés dans le petit salon, et une fois que Jack eut fermé la porte, Bardéak sortit le rouleau :
- L'heure est grave je pense.
- Comment cela?
-Tu vois l'espèce de sigle en forme de condor ici ?
- Le condor ? Le plus grand des charognards? Oui c'est vrai que ce sigle est très ressemblant.
- C'est le sigle d'Alarkhan. Ca ne me fait aucun doute, et c'est bien ça le plus inquiétant. Je pense que cette rumeur comme quoi Alarkhan est mort n'est crédible qu'à moitié. Ce qui ne nous laisse que quelques possibilités : soit il est vivant et cherche à étendre son pouvoir, soit il est mort et c'est un de ses lieutenants qui continue la lutte. Si ce lieutenant a réussi à tuer son Maître, il est d'autant plus puissant.
- Et à quoi ressemble cet Alarkhan ?
- Tu vois l'illustration ? Je te présente Alarkhan en personne.

Ainsi donc cet homme qui sacrifiait la jeune Elfe était Alarkhan. La forme sombre me parut différente, je ressentais un véritable dégoût pour ce qu'elle représentait.

- Mais Bardéak, comment se fait il qu'il puisse avoir des fidèles? Pourquoi a t'il des Sombres à son service ? Il n'y a personne qui ait essayé de le tuer ?
- La lutte serait assez inégale en réalité. On raconte quelques fois que Alarkhan a eu un second extrêmement puissant. Certains des mages de l'Académie auraient été tués sans avoir le temps de riposter, telle était la force du second d'Alarkhan. Un jour, il aurait voulu défier Alarkhan en duel, ce dernier n'a même pas pris la peine de se lever de son trône que l'autre se tordait au sol. Quand il eut fini de jouer le serpent par terre, il ne restait plus qu'à l'enterrer.
- Je pense que c'est parce qu'il a sacrifié cette Elfe qu'il est devenu aussi fort.
- Si ce rouleau le représente en train de sacrifier un Elfe, je ne pense pas qu'il n'en ait sacrifié qu'un. C'est la raison de sa longévité.

Jack entra à ce moment là, apportant le repas. Il avait les bras complètement chargés de nourriture et il nous dit :
- Et encore, je vous apporte que l'entrée.

A la fin du repas, après avoir laissé quelques pièces de ma bourse à Jack, j'allai déposer Bardéak au port. L'après midi était belle, un beau soleil brillait.
- Je parie que tu ne viens pas avec moi à l'Académie?
- Je ne tiens pas à retourner dans le seul endroit que je connais bien. Je pense visiter un peu, aller de ville en ville peut être.
- Nous aurons peut être besoin de toi, si mes craintes au sujet des Sombres se vérifient. Je te demande de faire attention avec eux. Ils sont sans pitié, et peut être essaieront ils de venger la quarantaine de leurs camarades que nous avons éliminés.
- Je n'ai pas peur pour moi. Il faut bien que j'affronte le destin des mages de l'Académie.
- Je le sais bien. Bon désolé mais je dois aller faire mon rapport à nos collègues, les autres Maîtres hein, Maître Nels.
- Donnez mes salutations à Naëria.
- Je n'y manquerai pas.

J'étais de nouveau seul dans Greyport, peut être pas sans le sou, mais seul au demeurant. Le plus drôle c'est que je ne savais même pas quoi faire, ni quelle occupation trouver. Le fait d'avoir pensé à Naëria me donnait une furieuse envie de retourner sur l'Ile. J'eus une idée : je devais voyager un peu afin de me changer les idées. En allant vers le marché, je vis un attroupement : un homme assez rondouillard haranguait la foule, il allait vers la ville minière de Mithland, en tant que marchand prospère il aurait besoin de gens pour assurer la sécurité de son convoi le long de la route. Un Nain qui paraissait assez vieux, avec une longue barbe et un visage ridé, portant un lourd paquetage qui sentait la poudre noire s'avanca et dit :
- Moi Angus, je te protégerai. J'ai bien envie de m'amuser avec mon tromblon moi.
Je manquais d'amusements alors je m'avançai aussi et dis :
- Moi aussi je suis ton homme pour ce voyage, je te protégerai marchand.