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Les Novices : Livre II - Adonis sang (partie IV)

La lumière du Monde


Un


Mimi se trouvait allongée sur une table en fer, plutôt froide, elle sentait l'air glacial de la salle, sombre, et dégoûtante, cela sentait mauvais, la chair pourrie, elle se croyait dans une boucherie. Elle redressa la tête puis écarquilla les yeux, elle avait le ventre tout rond, et les jambes écartelées sur des étriers, elle se trouvait dans une salle d'opération, attachée au lit froid. Une vive douleur s'empara d'elle, elle affecta un cri pour un autre. Elle vit la tête d'un squelette lui sortir d'entre les jambes, elle manqua défaillir.
- Poussez ! Poussez !, lui ordonna la créature.
Elle se mit à pousser malgré elle, parce que son ventre lui faisait atrocement mal. Mimi sentit l'odeur du sang, son vagin se déchirait, elle hurla, s'abandonnant sur le lit en fer. Elle poussait, elle continuait même après avoir entendu l'enfant crier, le sang était sorti en masse, une flaque immense qui se répandait sur son lit, Mimi pleurait, jamais elle n'avait souffert comme ça.
Lorsque le squelette approcha l'enfant de sa mère elle poussa des cris terrifiants qui couvraient ceux du bébé, il était couvert de sang et son visage était si horrible.
Mimi se réveilla brusquement, émergeant enfin de ce cauchemar, elle avait mal au ventre et à l'entre jambe, sans doute que le réalisme de ce rêve l'avait trop envahie.
- Qu'est ce qui se passe ?, demanda Kurt très inquiet en la voyant trembler de toute sa chair.
- Un cauchemar... Je vais très bien. Il... Il faut que j'aille boire un verre d'eau.
Mimi se leva et s'éclipsa de la chambre, Kurt était devenu très malheureux, elle pouvait encore sentir le goût de l'eau et s'en nourrir.
Mimi essayait vainement de sentir le goût de l'eau sur son palais, mais rien.
- Avant, elle n'avait pas de goût, mais là c'est pire, maugréa t-elle avant de jeter son verre dans le lavabo propre. Kurt ne se servait que de la chambre et tout était bien rangé, la maison aurait été merveilleuse s'il n'y avait plus ces toiles d'araignées, toute cette poussière et ce manque de clarté dans toutes ces pièces raffinées.
Mimi remonta dans la chambre, et là, elle fut surprise.
Frank enchaînait le cercueil de Kurt, alors que celui ci se trouvait encore à l'intérieur, il cognait très fort contre les parois du couvercle pour essayer de se libérer. Frank portait une arme sur lui, Mimi ne percevait plus que cela, son arme, et elle se retrouva alors entre ses mains. Ce n'était pas de la magie, mais elle pouvait maintenant se déplacer aussi rapidement que Kurt.
- Laisse le Frank !, ordonna t-elle.
Il se tourna vers elle très étonné et recula un peu du cercueil.
- Qu'est ce que tu fais ? Je t'ai demandé de le libérer !, somma t-elle.
- Non.
- Frank !
- Tu fais une belle connerie, dit-il.
- Parlons en de la connerie. Tu connais la connerie humaine ? La connerie des adultes ? Ce n'est pas étonnant que les enfants de ce monde se sentent constamment souillés, agressés, inutiles, c'est pour cela qu'ils se révoltent. Sans révolte, on est plus rien. C'est pour ça qu'on choisit de vivre seul... Cachés...
Frank recula encore, cette fois ci, Mimi le menaça avec son arme.
- Libère-le !, gronda t-elle.
- C'est de toi que tu parlais ?, demanda Frank en faisant semblant de ne pas l'avoir entendue.
- Oui, de moi et de tous les autres.
- Ta mère ?
- Ma mère est une cinglée, c'est pour ça qu'elle est enfermée, c'est parce qu'elle est morte, elle vit dans son monde, elle vit dans le noir total, hurla t-elle en s'approchant de Frank.
Kurt arrêta de cogner, il l'écoutait, elle avait tort, elle ne comprenait pas, elle ne savait rien...
- Et tu voudrais lui ressembler ?, souffla Frank.
Mimi s'arrêta, l'arme toujours pointée vers Frank.
- Qu'est ce que tu veux dire ? Qu'est ce que tu essayes de me dire ? Ne joue pas les psy Frank !
- Être un vampire, c'est exactement être comme ta mère, la folie, la vie et la mort, dit-il sans grande conviction.
- Sauf que moi, je me venge contre ces pauvres cons d'êtres humains, elle ria brièvement, des fous, des chiens, le monde est un vaste théâtre de récits bouffons avec des clowns à chaque coin, c'est Dieu qui doit se marrer. Moi, j'apaise leurs souffrances en écourtant leur vie si médiocre.
- Et les enfants des victimes ?
- Ils vivront beaucoup mieux sans ces grands malades, répliqua Noun.
- Mais c'est toi la malade, ta mère a été absente pour toi et regarde ce que tu es devenue, s'emporta Frank.
Mimi sanglota. La vision de cet enfant couvert de sang, celui de son rêve, lui faisait perdre la tête.
- Un monstre à l'image des mortels, fit-elle.
- Tu es encore mortelle, se calma Frank.
- Non ! Quand je t'aurais complètement vidé de ton sang, je ne le serai plus, j'aurai franchi le pas du dégoût à la folie.
Frank soupira.
- Alors, je dois te tuer.
Il s'élança vers elle, avant que Mimi n'ait le temps de se reprendre, il la bouscula, et Mimi s'allongea à terre. Frank aussi était rapide, il sortit sa dague en argent, mais hésita quelques secondes. Mimi ne se défendait plus, elle pleurait seulement. Frank porta sa main à son front et récita la formule du père Antonio.
- Je suis désolé Mimi, souffla t-il ensuite.
Kurt lui fit bientôt face.
- C'est Fadi pour toi, répliqua t-il.
Il attrapa Frank par le cou et le souleva du sol avec facilité.
- Tu as vécu trop longtemps, il y a trois mois encore, tu me suppliais de t'achever, glapissait Frank.
- Maintenant, je ne suis plus seul.
Kurt le relâcha, parce qu'il était quand même l'ami de Mimi. Frank se releva très vite.
- Tu veux revoir le soleil Kurt ?
Celui ci se retourna très surpris par ces mots, il accueillit la dague dans son coeur sans sourciller, il avait eu mal et envoya paître Frank. Kurt se mit à gémir sous le regard épouvanté de Mimi qui se relevait.
- Kurt ?, souffla t-elle.
La dague s'enfonçait seule à présent. Kurt chancelait vers la fenêtre encore recouverte du drap épais en velours.
Mimi se tourna vers Frank, les yeux embués.
- Tu l'as tué...
Kurt enleva le drap, la lumière fit sursauter Mimi qui s'était habitué à l'obscurité. Le visage de Kurt s'illumina.
- Kurt !, hurlait-elle.
La lumière du soleil entra avec joie, les rayons commencèrent à dévorer la peau de Kurt pour son plus grand plaisir.
Mimi ressentit une forte douleur, elle ne savait pas où exactement mais elle avait mal et se contorsionna pendant quelques secondes pour s'arrêter enfin, à bout.
- Fadi ?!, fit Frank en s'approchant, ça va ?
Elle se redressa, le visage amer et un peu vieilli. Elle vomit.
- Mon Dieu ! Je suis écoeurée, je vomis, je... Je suis redevenue humaine.
- Tu l'as toujours été, répliqua Frank.
Elle leva ses yeux vers le tas de cendres brun éparpillé près de la fenêtre, elle sanglota de plus belle.
- C'est ce qu'il a toujours voulu, même si tu étais devenue son nouvel amou, il n'aurait jamais souhaité vivre encore pour voir une autre personne chère à son coeur mourir, il était temps qu'il s'en aille, trop de souffrance achève un vampire tel que lui.
Mimi continua quand même à se lamenter, pleurant sur les cendres, les serrant contre sa poitrine. C'était de sa faute.
Frank ne dit plus rien, il était ailleurs, quelque chose l'avait frappé, quelque chose au loin l'effrayait, au point que les lamentations de Mimi l'agaçaient, c'était des yeux dans l'obscurité pure, une force malsaine, un enfant et une femme, une femme incroyablement belle...

Kei

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