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Névrose : Deuxième partie

4. « Mon enfant s'est écorchée les lèvres sur un bout de feuille.
Elle a des yeux atroces et lorsqu'elle verse ses larmes, la mer est rouge.
Mon enfant tombe à l'eau, elle s'enfonce si profondément, que la mer l'avale d'un coup.
Mon enfant est sauvage, ses cheveux noirs s'éteignent l'été,
Ils saignent lorsqu'elle s'endort dans l'eau.
Petite fille je t'ai vue hurler, pendant que sur Terre, les autres s'égorgent. »
Gally. extrait : - Wild Child - « Vermeil et écarlate »


27 Décembre 99 J - 5

Le téléphone résonna, aussitôt l'inspecteur Lavoisin attrapa le combiné.
- Oui ! Qui est à l'appareil ?
Clémence qui s'était assoupie sur le canapé se réveilla brusquement. L'inspecteur se tourna vers elle. Il avait été chargé de la surveiller depuis qu'elle avait reçu la cassette.
- C'est quelqu'un qui dit être votre amie, dit-il en lui tendant le combiné.
- Qui ?
- Claire Coulon.
Clémence se leva et lui prit sans ménagement le combiné des mains.
« Oui allô. Comment vas-tu ?... Oui, je vais bien. Non, je ne regarde pas la télévision... Je me fous de ce qu'ils peuvent raconter sur moi, je vais bien, je t'assure. »
Clémence se tourna légèrement vers l'inspecteur qui l'observait, il lui souriait gentiment, mais elle lui rendit très vite un regard froid et s'en détourna.
« C'est un inspecteur, il est là au cas où il y aurait un problème. Oui... Oui... », souffla-t-elle, « Au revoir. »
Clémence raccrocha et se tourna vers l'inspecteur, elle s'efforça de lui sourire.
- Un petit scrabble ?, proposa-t-elle.
- Vous avez chez vous une télévision et vous n'essayez pas de voir ce qui peut se passer à l'extérieur.
- L'extérieur n'est que problèmes et dégoût.
L'inspecteur chercha la télécommande du téléviseur et lorsqu'il la trouva, il alluma pour montrer à Clémence qu'elle n'avait rien à craindre.
- Regarde, c'est une nouvelle émission, si tu arrives à exterminer le bug qui s'active sur l'écran géant du fond, tu gagnes 20 000 mille Francs reconvertis en Euros, expliqua-t-il.
- C'est absurde, lança Clémence.
- Comme toutes les émissions de cette chaîne.
Elle rit.
- J'avais 16 ans lorsque ta mère a été assassinée, incisa-t-il froidement.
Clémence arrêta de sourire, pourquoi fallait-il qu'ils en reviennent tous à cette période de sa vie ?
- Et lorsque ta soeur est morte à son tour, j'ai fait parti de ton fan club, c'est morbide, je le sais, mais comme tous les autres je t'ai écrit, et j'ai attendu ta réponse avec impatience.
- Je n'ai jamais ouvert une seule de ces lettres.
- Je suis désolé de ce qui t'arrive, de ce qui t'est arrivé.
Elle ne dit plus rien, abasourdie, ses tempes allaient exploser, c'était son stress.
- Pardon, se reprit l'inspecteur.
- Ma... Ma mère était dans la cuisine, elle faisait des cookies, et c'est à ce moment que Papa est entré, il s'est avancé vers Maman doucement, puis il l'a battue, elle a hurlé à s'en étouffer et il l'a poignardée devant moi. Je suis restée là, hébétée et je n'ai rien pu faire, je croyais ensuite qu'il allait me tuer, mais il s'était tourné vers moi, le sourire aux lèvres et il m'a dit que tout irait bien en traînant Maman dans le jardin... Oh ! Mon Dieu ! J'ai vu tant de sang dans ma vie.
L'inspecteur ne disait rien, il ne savait plus vraiment ce qu'il devait dire.
Le téléphone résonna, ce qui les fit sursauter.
Clémence se moqua d'elle, elle prit le combiné.
« Oui allô. »
Elle blêmit d'un coup, puis raccrocha nerveusement.
L'inspecteur se leva.
« Qu'est ce qui se passe ? », demanda t-il, « Qu'est ce qui se passe? »
Clémence se dirigea vers la fenêtre.
- Il me voit..., dit-elle enfin, il me voit.
- Ne restons pas là, déclara-t-il en l'empêchant d'aller vers la fenêtre, je t'emmène au commissariat.
- Ce ne sera jamais assez loin de lui, jamais assez loin de tous ces malades, hurla-t-elle.
Il ne bougeait plus, Clémence se calma alors. Il s'approcha d'elle, elle recula instinctivement, il avançait encore, et le mur la stoppa.
- Je t'ai écrit plusieurs lettres seulement pour te dire que je t'aimais, murmura-t-il.
- Comme les autres, tu aimais ma détresse, répliqua-t-elle.
- Justement, tout ça c'est toi, c'est toi.
Il se pencha pour l'embrasser, mais elle l'esquiva.
« Partons d'ici ! », déclara-t-elle.
Il acquiesça.
« On y va. », fit-il un peu déçu.
Elle le suivit dans le couloir, dans les escaliers et dans la rue, en jetant toujours un oeil derrière elle. Clémence monta rapidement dans la voiture, elle se sentait beaucoup mieux. Au moment où l'inspecteur s'apprêtait à démarrer, il reçut un vilain coup de crosse à la nuque. L'agresseur portait un masque en cuir, il était assis sur le siège arrière. La tête de l'inspecteur heurta la volant et s'immobilisa. Clémence se tourna vers l'inconnu bouillante de rage, elle essaya de lui asséner des coups de poing.
« Salaud ! Salaud ! », cria-t-elle.
Il lui décocha une droite à la mâchoire, elle s'évanouît en serrant toujours dans sa main droite le masque en cuir qu'elle avait réussit à enlever.


5. « Est-ce que je peux rêver ?
En ce monde où les uns se cherchent et les
autres se perdent, ai-je le temps de sourire à l'innocence?.
Si la tristesse se lit ailleurs que dans mes yeux, n'aurais-je plus
le droit de pleurer ? Et si l'envie se fait sentir, pourquoi
n'épouserais-je pas la mort puisqu'elle vit parmi nous. »
Gally. extrait : - Triste enfant - « Je m'aime tuer... »


28 Décembre 99 J - 4

Le commissaire faisait les cents pas à l'infirmerie du commissariat où l'inspecteur se faisait soigner.
- Attention, il va hurler, lui souffla Géraldine à l'oreille.
- Mais bon Dieu !, commença effectivement le commissaire, qu'est ce qui s'est passé ?
- Il se trouvait dans ma voiture, qu'est ce que je pouvais en savoir ?!, se défendit l'inspecteur.
- Il n'y a aucune nouvelle d'elle. C'était notre seule piste.
- Vous parlez d'elle au passé, elle n'est pas encore morte, s'emporta l'inspecteur.
- Et comment le sais tu ? Ton instinct sans doute, le taquina Géraldine.
- Son père l'a laissée en vie, Bruno Mulker l'a laissée en vie, je suis seulement la logique.
- Peut-être que cette fois pour changer, il va s'en payer une bonne tranche, persifla Géraldine.
- Je suis sûr qu'elle va bien commissaire, fit l'inspecteur en se détournant de sa coéquipière, agacé.

Clémence avait 17 ans, elle se trouvait dans les gradins du gymnase entourée de son amie Claire et du petit ami de sa soeur, qui exécutait ses pas de danse rythmique avec précision. Raphaelle fit une roue et lorsqu'elle avait atterri sur ses pieds, parfaitement droite, elle poussa un terrible hurlement qui glaça d'effroi les spectateurs, du sang s'échappait de sa bouche et de son nez. Sur son body bleu pailleté, une vilaine tache s'étendait. Un homme au visage gras la tenait fermement par la taille, il enleva lentement la lame. Clémence descendit rapidement les gradins, se faisant bousculer par les gens affolés. Elle hurla le nom de sa soeur qui titubait vers elle.
« Clémence ! », hurla Raphaelle, « Clémence ! »
Puis elle s'écroula.
Sans que l'on ne sache comment, Bruno Mulker s'était enfui et Clémence dans ses bras, tenait le corps meurtri de sa soeur. Elle avait du sang sur les mains, un bain de sang...
Clémence ouvrit les yeux, elle sentait que ses vêtements étaient mouillés car ils lui collaient à la peau. Ses cheveux étaient trempés, elle avait l'impression d'avoir pris un bain. Clémence se releva doucement, et ouvrit les yeux hallucinés. Elle pataugeait dans un bain de sang presque refroidi, elle essaya de hurler son dégoût mais elle n'obtint que des gémissements. Elle essaya de se relever mais elle glissait à chaque fois sur la gigantesque flasque qui la dévorait presque. Elle recommença à maintes reprises et échoua à chaque tentative, alors elle marcha à quatre pattes jusqu'au salon.
Clémence avait observé l'endroit où elle se trouvait, elle était certaine d'être chez sa voisine Madame Kachin, ce qui l'inquiétait beaucoup. Elle releva la tête vers le mur d'en face. Madame Kachin était clouée sur son mur, les bras et les jambes écartées comme une étoile, le flanc à moitié offert. Clémence sanglota et baissa les yeux devant tant d'horreur, elle vomit. Elle se jeta sur la porte et attrapa la poignée sur laquelle elle prit appui pour se remettre sur pied, elle ouvrit la porte et tomba nez à nez avec Amal qui présentait le début de son émission.
« Oh ! Mon Dieu ! », fit cette dernière.
Clémence retomba dans la flaque de sang.
« Oh ! Mon Dieu ! », fit de nouveau Amal en aidant Clémence à se relever, mais elle glissa aussitôt et se retrouva à genoux dans le bain de sang, seul le caméraman qui possédait des baskets n'avait pas chuté, il filmait le corps de Madame Kachin, écoeuré mais tout aussi fasciné par ce qu'il voyait pour la première fois.
- Merde !, répétait-t-il sans arrêt.
- Viens m'aider Thomas, dépêche toi !, hurla Amal presque hystérique.
Il se hâta vers elle et lui tendit la main. Elle enleva ses talons et même si le contact du sang sur ses plantes de pieds lui était désagréable, Amal se remit sur pied et aida Clémence à se relever.
« Il faut sortir ! », dit-elle.
Ils sortirent le plus rapidement possible de l'appartement, Amal referma la porte.
Clémence avait froid, elle tremblait parce que ses yeux étaient rouges, son monde était devenu complètement rouge.
« Ca va aller ! », essaya de rassurer Amal.
Clémence se jeta dans ses bras pour prendre appui sur quelqu'un, sinon elle allait retomber par terre. Et doucement sans regarder personne, Clémence se mit à pleurer.
Thomas continuait de filmer.

La police avait investi les lieux.
- Qu'est ce que vous foutez ici ?, avait demandé l'inspecteur à Amal.
- On m'avait appelée, je savais que c'était le tueur en série...
- Ne parlez pas de tueur en série, avait hurlé l'inspecteur.
- Foutez moi la paix, je suis allez voir parce que...
- C'était un taux d'audimat de plus, fit Géraldine.
Amal leur avait lancé un regard glacé.
- Thomas ! File moi une cigarette !
Elle avait recommencé, agitée comme un beau diable, Amal arracha la cigarette des mains de son caméraman et méprisa le monde en un juron.
Clémence était allée chez son amie Claire qui vivait dans un pavillon sur les conseils de l'inspecteur et de l'agent Kelly. Claire était partie chez sa cousine parce qu'on le lui avait demandé, pour son bien, la police avait réquisitionné sa maison.
Clémence s'était lavée plusieurs fois avant de s'écrouler sur le canapé du salon, elle avait peur de dormir dans la chambre, en bas, elle se sentait rassurée, on avait mis des gardes partout pour la protéger. L'inspecteur était assis sur le fauteuil en face d'elle et attendait.

La même histoire se répète, l'assassin a tué sa victime en présence de Mademoiselle Joëlle, un scénario bien connu pour ce que les gens appellent maintenant « la trilogie Joëlle ». La police pense que le meurtrier veut essayer d'achever le travail que monsieur Joëlle et Bruno Mulker n'ont pas pu terminer, commenta Amal sur le téléviseur.
« L'histoire se répétera encore ma jolie. Je vais la guérir, je serai le seul à avoir réussi. », dit-il.
Les notes acides d'une guitare électrique s'élevèrent dans toute la pièce. Il se leva lentement de son fauteuil légèrement affalé sur lui-même. Il redressa la tête et la cascade de cheveux lui retomba sur les épaules. Il se mit à hurler pour essayer d'imiter la mélodie saturée.


6. « Anarchie de tous les temps et crève-coeur enchaînés.
L'analyse de ce qui est superficiel nous rappelle que l'amour est un viol,
Elle transparaît pourpre comme la langue maudite de vos adorés. »
Gally. extrait : - Violet - « Les proies ambulantes »


29 Décembre 99 J - 3

Lorsque Clémence se réveilla, il était un peu plus de 13h00, elle avait très faim. L'inspecteur faisait des allers-retours incessants de la cuisine au salon, il ne semblait pas avoir remarqué qu'elle s'était enfin réveillée.
- Excuse moi ?!, fit-elle.
- Oui ?
Il s'arrêta enfin pour s'avancer vers elle.
- Ca sent très bon, remarqua-t-elle bientôt.
- Oui, je prépare un plat, ma seule spécialité.
- Laquelle ?, demanda t-elle impatiente de passer à table.
- Du couscous, répondit l'inspecteur.
Elle lui souriait les yeux mi-clos, encore lourds de sommeil.
« Je suis affamée », dit-elle d'un ton faible.
Elle voulait encore rêver, ne plus se soucier de quoi que se soit. Clémence bailla sans gêne en s'étirant longuement.
- Sommes nous seuls ?, demanda-t-elle en se frottant vivement les paupières.
- Non, malheureusement, la maison est sous surveillance constante.
Clémence se leva lentement, elle s'approcha de lui.
- Mais personne n'a le droit d'entrer à moins que tu ne sois en danger, précisa-t-il.
- Est ce que je suis en très grand danger avec toi ?, demanda Clémence, prête à jouer à tous les jeux du monde pour oublier l'autre dingue.
Et puis cet inspecteur était à peu près à son goût. Ne lui avait-il pas avoué son attachement ?
L'inspecteur se pencha vers elle pour l'enlacer, pour l'embrasser, avant il avait rêvé de ce moment, maintenant il voulait assouvir tous ses démons. Il l'amena sur le canapé. Clémence enleva sa chemise et l'aida ensuite à ôter la sienne.
On les épiait, quelque part, un point, un trou, dans un endroit poussiéreux tout en haut de la maison, on écumait de rage en les voyant prendre autant de plaisir.
« Elle est à moi ! », ragea l'inconnu. Il se mordit les lèvres si fort que le plancher sale du grenier s'imbiba d'une goutte de sang.

On ava it tiré. L'inspecteur avait sursauté, Clémence se réveilla après, parce qu'il s'agitait de trop.
« Qu'est ce qui se passe ? », demanda-t-elle.
L'inspecteur se leva d'un bond, il se rhabilla rapidement et enleva son arme de son étui.
Clémence avait compris. Elle s'habilla aussitôt sans prendre son temps, apeurée, elle ne pourrait plus supporter d'être encore enlevée, amenée dans des endroits sales où son kidnappeur lui parlerait de choses écoeurantes, insupportables.
- Ne me laisse pas Chrysler !, supplia t-elle à l'inspecteur qui parcourait la pièce du regard, sur ses gardes.
- Clémence va te cacher quelque part !, ordonna t-il.
- Je ne veux pas rester seule.
Il lui lança un regard désagréable. Ses tempes la tiraillaient, c'était cette migraine affreuse.
« C'est pour ton bien, il ne faut pas qu'il te trouve. », dit-il.
Clémence écarquilla les yeux, pour la seconde fois, la crosse s'abattit sur le crâne de l'inspecteur. Clémence ne hurla pas, elle ne pouvait plus, elle ferma seulement les yeux pour pleurer, il l'a frappa ensuite, et elle perdit connaissance.

Kei

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