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Névrose : Première partie

A Clémence R.

1. « Tous pris au piège, ne me demandez aucune aide,
Car je n'aide que la mort, à vous tuer un par un,
Elle, elle ne me causera aucun tort »
Clémence R. extrait : - A quelqu'un - « Je m'aime tuer... »


24 Décembre 99 J - 8

Amal Kelaf sortit de sa loge très énervée suivie de sa maquilleuse et de son directeur artistique, elle était la speakerine d'une nouvelle émission de télévision qui depuis sa première diffusion avait su conquérir un large public.
« Laissez moi Dalila ! », ordonna Amal d'un ton glacé en s'adressant à sa maquilleuse qui n'arrêtait pas de lui agiter ses pinceaux sous le nez.
« Je ne suis pas un tableau. », continua t-elle.
Dalila s'arrêta sans rien ajouter, elle s'éloigna en silence. Amal qui la regardait s'en aller, l'expression amère, se remit en marche pour atteindre les coulisses toujours poursuivie par son directeur artistique, un petit bonhomme chauve à l'allure pressante mais qui avait malgré tout un air sympathique...
- Qu'est ce qui te contrarie ?, lui demanda t-il enfin.
- Qu'est ce... Qu'est ce que j'ai ? Bordel Emmanuel ! C'est toi qui m'avais conseillé d'arrêter de fumer pour être un sujet positif à l'approche de l'an 2000.
Elle s'arrêta soudain et se tourna vers lui presque suppliante.
- Regarde moi Emmanuel ! Ai-je l'air d'un sujet positif ?
- Bien... Bien sûr ! Je te trouve rajeunie depuis que tu as arrêté d'étouffer tes poumons. Et depuis, le taux d'audimat a considérablement augmenté ainsi que ton salaire.
- C'est sûrement ma tension qui va exploser, grommela t-elle avant de soupirer et de reprendre sa route, toujours suivie de près par son agent.
- Emmanuel ! Trouve moi quelque chose, n'importe quoi qui pourrait me calmer, insista Amal.
- Ton public seul doit suffire, répondit-il.
Ils arrivèrent dans les coulisses.
- C'est à vous dans 15 secondes Mademoiselle, prévenait l'opérateur qui se trouvait près d'eux.
- Où est le Dr Malika Téfira ?, lui demanda Amal.
- Sûrement dans sa loge Mademoiselle.
- Allez la chercher ! Ce sera bientôt à elle d'intervenir.
L'opérateur se pressa et le générique de l'émission débuta. Amal prit une profonde respiration, elle changea d'expression, son visage devint souriant, moins soucieux. Elle se mit à courir sur le plateau sous les applaudissements de son public. Amal s'avança vers eux, elle se courba, puis alla gagner son canapé, c'était un concept de l'antenne qui voulait quelque chose de nouveau pour essayer d'être encore plus proche des téléspectateurs. Amal avait trouvé ça stupide, et son avis resterait le même tant qu'elle poserait ses fesses sur ce canapé inconfortable.
Elle attrapa le micro qui se trouvait sur la table basse en verre face à elle et attendit que les applaudissements du public tarissent.
- Bienvenue à l'émission « Votre ticket est valable », l'émission où tous les sujets sont proposés pour votre seule soif de curiosité. Je rappelle à tous que le nouveau millénaire approche à grands pas, il nous reste seulement 10 jours et je n'ai pas fumé une seule cigarette, ni quoi que ce soit d'autre.
Des rires brefs s'élevèrent dans le public.
- Aujourd'hui, notre invitée de ce soir est le docteur Malika Patrick, la psychiatre devenue célèbre depuis l'affaire Joëlle. Rappelez-vous, il y a 10 ans, dans la ville de Montreuil, une femme, Madame Mélanie Joëlle, a été assassinée par son propre mari devant leur fille cadette, Clémence. Les policiers retrouveront aussi le corps d'une amie de la petite fille enfoui dans le jardin, Sunny Lee Yun. Clémence avait vécu en totale inertie sous les yeux attentifs de son psychiatre, Madame Patrick depuis l'emprisonnement de son père, qui était même allé jusqu'à inventer une histoire de fantôme qui hanterait sa propre maison et qui l'aurait forcé à agir ainsi. Certains diront qu'il voulait bénéficier du traitement pour les fous et éviter la prison...
Un silence total s'était abattu sur le public, ils se souvenaient de cette histoire qui avait bouleversé les moeurs. Amal souriait, elle tenait un bon sujet, son taux d'audimat allait grimper au plafond.
- La soeur de Clémence, Raphaëlle Joëlle, avait décidé de prendre en charge sa cadette, continua t-elle, mais un jour, souvenez-vous téléspectateurs, un fou s'est permis d'assassiner devant des millions des personnes Raphaëlle, toujours devant Clémence qui servira plus tard, d'appât à la police pour arrêter Bruno Mulker. Le meurtrier déclarera plus tard à la presse qu'il voulait juste reproduire « le bon son », le cri de Madame Mélanie Joëlle lorsque la lame avait pénétré sa chair, pour soi disant libérer la petite Clémence. Voila, mesdames et messieurs, mon récit terminé, je vous demande d'accueillir Madame Malika Téfira qui vient nous faire pour la première fois quelques révélations sur l'affaire qui défraya la chronique.
Les applaudissements du public emplirent de nouveau le studio, mais le docteur ne vint pas. Amal fronça les sourcils et se tourna vers les coulisses, vers son agent et l'opérateur qui était allé chercher le docteur. Ils haussèrent tous deux les épaules.
- Bon, fit Amal en faisant face à son public, le visage faussement illuminé, il semblerait qu'elle se soit perd... Avant d'avoir pu finir sa phrase, l'attention d'Amal se perdit, elle entendait ce petit bruit, c'était comme si on essayait désespérément de faire marcher une poulie rouillée. Son instinct lui fit relever la tête pour regarder au-dessus d'elle. Elle se mit à hurler si fort qu'elle effraya son public et tous les autres.
Amal se laissa glisser de son fauteuil pour ramper jusqu'aux caméras de télévision, un autre cri que le sien se fit entendre, puis ils virent tous le corps du docteur tomber comme une masse et s'arrêter d'un coup sec, le cou enroulé par un câble épais, ses mains mortes essayant pourtant de l'enlever, elle s'étouffait, son regard s'était perdu dans la foule et sa langue pendait hors de sa cage, elle remuait encore un peu, mais elle était déjà morte. Elle urina pour la dernière fois sur le fauteuil où elle aurait dû prendre place. La panique gagna le public, ils essayèrent de quitter le studio, criant, geignant comme si leurs vies étaient menacées.
Emmanuel aida Amal à se relever.
- Emmanuel, j'ai besoin de nicotine, souffla t-elle en contemplant le quartier de chair nue qui pendait au milieu du studio en tournant sur lui-même comme une toupie défaillante.

La police avait investi les lieux. On avait décroché le corps du docteur.
- Cigarette ?, demanda le commissaire Patino en tendant son paquet à Amal.
- Non, répondit celle ci en toisant son agent avec reproche.
- Vous n'êtes pas trop secouée ? Ca va aller ?, lui demanda le commissaire en rangeant son paquet.
- Ca ira oui, merci, répondit-elle en s'enfonçant dans le canapé de sa loge, elle était très fatiguée maintenant.
- Qu'est ce qui s'est passé ?
- Je vous l'ai déjà dit, soupira t-elle, j'ai entendu ce bruit de rouille, ça venait de là-haut, alors j'ai regardé au-dessus de ma tête pour vérifier que rien ne me tombe dessus et j'ai vu cette forme qui descendait lentement vers moi, puis c'est arrivé à toute vitesse, j'ai paniqué, point.
Une jeune Antillaise et un jeune homme entrèrent à leur tour.
- Je ne donne plus d'autographe, leur dit Amal souriante.
- Non, ce sont des collègues. Agent Kelly et inspecteur Lavoisin, présenta le commissaire.
- Je vais avoir droit au FBI ?, persifla t-elle.
Le jeune homme lui souriait et se tourna ensuite vers son supérieur.
- Les hommes du labo ont trouvé quelque chose, prévint-il.
- Qu'est ce que c'est ?
- Ils ont remarqué des petites coupures légères sur le dos de la victime, le meurtrier a dû s'y prendre avec un cutter, il ne devait pas tuer la victime sur le coup, il voulait qu'elle souffre....
- Ils ont passé ça au scanner, c'est un message, continua l'agent Kelly.
Amal s'illumina de nouveau, le besoin de nicotine lui échappait, elle venait de trouver un nouveau sujet.
- Je veux être la seule à couvrir cet événement, se ravit-elle.
- Ce n'est pas un évènement, c'est la vie d'un être humain, rétorqua Kelly.
Elle continua malgré tout de sourire à son agent qui était de son avis.
- Qu'est ce qu'il y avait d'écrit ?, demanda le commissaire.
- Il veut parler à Clémence Joëlle, le message lui est adressé, répondit l'inspecteur.
- C'est écrit : « aide-moi Clémence »..., termina l'agent Kelly.
- De mieux en mieux, s'emporta Amal, un tueur repenti...
Ils se tournèrent vers elle, la mine sombre.
Amal se tut pour de bon.


2. « Pleure enfant de mon coeur,
Pour tes larmes de diamant
Et tes yeux opales,
Mon coeur de pierre t'est offert »
Clémence R. extrait : - complainte d'une mère sans fils - « Je m'aime tuer... »


25 Décembre 99 J - 7

Clémence ouvrit la porte du tambour, la machine était terminée, elle remplissait le panier des vêtements maintenant propres, elle sortit de la cuisine, le panier sous les bras et se dirigea vers la porte d'entrée. Elle l'ouvrit et traversa le couloir.
Clémence donna quelques coups de pied à la porte qui s'entrebâilla sur une vieille dame.
- Voilà Madame Kachin, votre linge sale est propre, fit Clémence en entrant dans la petite pièce éclairée du salon.
Elle déposa le panier à terre de peur de s'approcher trop près de la partie ensoleillée. Clémence ne supportait pas les pièces éclairées par la lumière du jour, elle ne savait pas vraiment pourquoi, mais elle était comme ça.
- Je vais m'en aller Madame Kachin, annonça t-elle à sa voisine sans quitter des yeux le halo de lumière qui pointait au-dessus de la fenêtre.
- Tu ne veux pas rester ?! J'ai fait des cookies....
- Non, ce n'est pas la peine, j'ai beaucoup de travail Madame Kachin, je pourrai passer ce soir si vous insistez, fit Clémence en détachant machinalement son regard de la fenêtre.
- J'en serais ravie.
Clémence se dirigea vers la porte, suivie de sa voisine qui lui ouvrit.
- Au revoir mon enfant.
- A ce soir.
Clémence la quitta pour de bon, elle lui tourna le dos et s'engagea dans le couloir. Mais elle s'arrêta brusquement lorsqu'elle vit que l'on l'attendait sur le palier de sa porte.
- Oui ?
Ils se tournèrent vers elle et Clémence reconnut le commissaire Patino.
- Bonjour, comment allez-vous ?, demanda-t-il sans pour autant lui adresser un sourire, elle avait l'impression de le dégoûter.
- J'allais bien, répondit-elle sèchement en leur ouvrant la porte, entrez !
Ils entrèrent tour à tour dans l'appartement.
- Clémence ? Que se passe t-il ?, demanda Madame Kachin à l'autre bout du couloir.
- Rien Madame Kachin. Ce sont des amis.
Puis Clémence referma la porte. Les invités s'installèrent sur le canapé gris qui se trouvait dans le salon lugubre. Clémence s'avança.
- Qu'est ce vous me voulez ?, demanda Clémence d'un ton sec.
Ca sentait le renfermé, il y régnait un désordre lamentable, les volets étaient à moitié entrouverts et l'agent Kelly se sentait mal à l'aise dans cette atmosphère tandis que les deux hommes firent semblant d'oublier que l'endroit était triste.
- Vous n'avez pas regardé les infos ?, demanda le commissaire.
- Non, la télé ce n'est pas bon pour moi.
- Vous êtes malade ?, s'enquit l'agent Kelly.
- La télé n'annonce que de très mauvaises nouvelles, je ne les supporte plus.
- Alors, ça ne va pas vous plaire, fit le commissaire.
Clémence s'asseya en face d'eux, elle avait l'impression d'être de nouveau dans un tribunal comme lors de tous ces procès lorsqu'elle était jeune. Elle avait l'impression que l'homme assis à côté d'elle la détaillait avec insistance.
- Une femme est morte sur le plateau d'une émission de télévision hier soir, annonça le commissaire.
- Et alors, j'en suis navrée.
- C'était une de vos connaissances, le docteur Malika Téfira.
Clémence se sentit mal tout d'un coup.
- Nous l'avons retrouvée pendue à un des étaux qui retenait les spots, un câble bien raide, continua l'agent Kelly.
Le commissaire soupira.
- Il y a d'autres façons d'annoncer certaines choses Géraldine.
Celle ci regardait Clémence qui donnait l'impression de pleurer.
- Je suis désolée, s'excusa l'agent Kelly.
- Vous êtes venus m'annoncer la mort de mon psychiatre, sans doute la seule personne qui puisse m'aider, est ce qu'il vous faut autre chose pour me faire mal ?, s'emporta Clémence.
- Son assassin nous a fait parvenir un message, répondit le commissaire.
- Bruno Mulker ?, demanda Clémence.
- Non, il est mort en prison il y a de ça deux jours. Celui qui nous a appelé voulait uniquement vous parler, seulement à vous.
- Mon père !, s'épouvanta t-elle.
- Il est encore en prison, nous avons vérifié.
Clémence ne dit plus rien.
- J'ai encore besoin de vous, déclara le commissaire.
- Il faut le coincer avant que la panique ne gagne Paris, c'est bientôt l'an 2000, fit Géraldine.
- On... A moi, on m'avait dit que je n'aurai plus à m'inquiéter, que je mènerai une vie normale. J'attends aussi beaucoup de ce millénaire, peut-être même plus que les autres. J'ai perdu toute ma famille, je me suis perdue, je veux retrouver ma vie.
Elle se tourna vers l'inspecteur qui continuait à la dévisager.
- Tu veux ma photo ?, gronda t-elle.
Il se reprit, Clémence se leva d'un bond.
- Vous perdez votre temps avec moi, je ne veux plus de cette histoire, dit-elle.
- C'est la vôtre, c'est votre trilogie à présent, rétorqua Géraldine.
- Merci de votre visite, fit Clémence en allant leurs ouvrir la porte.
- Réfléchissez !, commença le commissaire.
- C'est déjà fait, au revoir.
Ils s'en allèrent alors.
- A bientôt, fit l'inspecteur.
Clémence les observa dans les escaliers, elle les vit disparaître, s'engouffrer dans le noir, l'ampoule était défaillante parfois.
- Clémence !
Elle sursauta et leva la tête vers Madame Kachin.
- Vous n'avez pas l'air bien mon enfant.
Clémence sortit de son appartement, elle referma la porte derrière elle, et traversa ensuite le couloir.
- Je vais finalement manger vos cookies Madame Kachin, dit-elle.
Puis elle pénétra dans l'appartement de sa vieille voisine.

Dans un entrepôt vide, on entendait quelques gémissements faibles. C'était une jeune femme. Elle avait les yeux bandés et tenait dans ses mains une corde à sauter. La jeune femme essaya de se repérer, elle pourrait s'enfuir, mais elle avait peur qu'il la tue sur place.
- Tu peux enlever ton bandeau, fit une voix lointaine.
Elle porta ses mains tremblantes vers son visage pour enlever le bout de tissu. Elle pleurait, ce n'était guère plus clair et elle avait horreur du noir.
- Je vous en prie monsieur !, sanglota-t-elle.
- Je ne te ferai aucun mal.... Avance encore !
Elle obéissait puis s'arrêta, elle tremblait de plus en plus, c'était impossible de se reprendre.
- Oh ! Mon Dieu !, chuchota t-elle.
La jeune femme regarda tout autour d'elle pour essayer d'apercevoir son bourreau, mais sans succès.
- Je vous en prie, monsieur ! Laissez moi m'en aller, supplia t-elle.
- Joue pour moi, dit-il, joue à la corde !
Elle suivit une nouvelle fois ses instructions. La jeune femme essaya de se tenir droite. Oh ! Mon Dieu ! Peut-être qu'il allait lui tirer dessus pendant qu'elle jouerait.
- Chante, s'il te plaît, demanda l'homme.
- Jeannot... Lapin, la canne... à la main...
Elle hurla tout d'un coup de douleur et un éclat de rire s'éleva dans l'entrepôt.
La jeune femme s'arrêta, et baissa les yeux vers le sol, elle vit les reflets brillants de trentaines ou plus de lames de rasoir disposées en champ à ses pieds sanglants. Elle se mit à courir en continuant à hurler, les lames s'enfonçaient dans sa chair à chaque pas. Vaincue, elle tomba à genoux, fatiguée et écoeurée. Les lames embrassaient les paumes de ses mains et le bout de ses genoux. Elle arrêta curieusement de crier.
- Ne t'arrête pas ! Je t'en prie, gémissait l'homme, sa voix résonnait dans tout l'entrepôt, peut-être qu'il avait un micro, ou qu'il se trouvait près d'elle.
La jeune femme s'écroula, et les lames, enfin, goûtaient à la chair de son corps.


3. « Tes yeux auparavant avides, ne convoitent plus rien,
Et ton coeur livide semblable au mien, ne ressent
Que la peine d'un souffle.
Tu t'effaces devant les flammes qu'habitent leurs âmes,
Et tu regardes en tremblant le sang qui s'écoule de leurs veines. »
Clémence R. extrait : - A quelqu'un - « Je m'aime tuer... »


26 Décembre 99 J - 6

L'inspecteur Lavoisin était accroupi près du corps de la victime, il enfila ses gants et la retourna légèrement sur le dos. Géraldine fut écoeurée à tel point qu'elle tourna de l'oeil et prit appui sur le commissaire qui se moquait d'elle.
Le champ de lames avait disparu, mais sous la victime, il y en avait tout un nid, la corde à sauter ne s'y trouvait plus également. La victime avait des plaies sur tout le corps, une lame était restée coincée dans une de ses paupières, l'inspecteur l'enleva sans ménagement, Géraldine ne regardait plus.
- Kelly !, gronda le commissaire.
Géraldine essaya de se reprendre.
- Essayez de me trouver l'identité de cette jeune fille, un papier, un portefeuille...
L'inspecteur s'exécuta, mais en vain, elle n'avait rien sur elle.
- Nous attendrons que quelqu'un se manifeste à la morgue pour elle.
- Commissaire !, hurla-t-on.
Ils se retournèrent vers Amal qui brandissait déjà son micro vers eux, suivie d'un caméraman.
- Vous n'avez rien à faire ici, tonna le commissaire.
Elle se posta à ses côtés et porta le micro à son menton.
- Je suis prête, dit-elle au caméraman qui commença à filmer, il lui fit signe lorsque le voyant rouge s'alluma.
- Bonjour chers téléspectateurs et téléspectatrices, je me trouve ici dans le vieil entrepôt de Bobigny, où un autre crime odieux vient d'être commis. A quand exactement remonte la mort ?, demanda-t-elle en s'adressant au commissaire.
Celui-ci s'emporta.
- Arrêtez cette caméra, gronda-t-il en s'adressant au caméraman en poussant violemment l'objectif.
Amal soupira.
- Vas y coupe !, ordonna-t-elle à son assistant.
Il éteignit la caméra.
- Je croyais que l'on devait collaborer ensemble, commença Amal en s'adressant au groupe.
- Je ne vous ai jamais dit de vous servir, rétorqua le commissaire.
- J'informe les gens, se défendit-elle, puis son regard se posa sur le corps de la victime. Ô ! Mon Dieu !, fit-elle en s'approchant plus près.
- Qu'est ce qui vous arrive ?, demanda l'inspecteur.
- Elle doit trouver ça écoeurant tout comme moi, fit Géraldine.
- C'est... C'est Dalila, balbutia Amal.
- Vous connaissez cette fille ?, demanda vivement l'inspecteur.
- C'était... C'était ma maquilleuse, répondit-elle en se tournant doucement vers eux pâle comme de la porcelaine.

Clémence avait terminé de faire son jogging, elle montait les escaliers un peu fatiguée et tomba nez à nez avec le facteur.
- Bonjour !
- Bonjour, lui rendit-elle essoufflée, il y a quelque chose pour moi ?
- Vous êtes ?
- Clémence Joëlle.
Il fouilla dans son sac pour en sortir une enveloppe imposante qu'il lui tendit de suite.
- Merci, dit-elle en prenant le colis.
Clémence continua de monter les escaliers et arriva chez elle.
Elle décacheta l'enveloppe avec enthousiasme, depuis très longtemps, elle était coupée des autres, ni lettre, ni colis, mais elle ne trouva seulement une cassette audio, dans une si grande enveloppe ? Clémence attrapa le walkman qui se trouvait sur la table basse du salon, elle s'assit sur le canapé et écouta. Elle fronça bientôt les sourcils, c'était une femme..., elle gémissait, suppliait, puis elle sanglotait, elle hurla... Clémence sursauta, elle arracha ses écouteurs de ses oreilles et se dirigea vers le téléphone pour attraper le combiné, sa tête lui tournait un peu.

Marthe se baladait dans la chambre un peu sombre de l'hôtel, un peu miteux, mais elle était bien trop saoule pour se rendre vraiment compte de son état et du sien.
- Où est ce que tu es ?, demanda-t-elle en riant.
- Là ! Tout près de toi, souffla t-il.
Marthe empoigna la bouteille de whisky et prit une gorgée, avant de se rendre dans la chambre. Son ami se cachait dans l'ombre mais il était présent autour d'elle, tout autour.
Marthe se coucha sur le lit après avoir déposé la bouteille sur la table de nuit.
- Tu me sens ?, demanda t-il doucement.
- Oui.
- Tu n'as pas peur ?
- Non.
- Tu devrais....
Elle rit.
- Tu essaies de m'exciter ou quoi ?, demanda t-elle.
- Ca ne marche pas ?
- Ca ne marchera que si je te vois. Viens !
Le lit remua doucement, elle savait qu'il venait à elle.
- Viens !, répéta-t-elle.
Il se mit au-dessus d'elle. Marthe écarta les jambes, elle ne le voyait toujours pas, l'ombre était toujours là, c'était comme s'il l'emmenait partout avec lui. Marthe essaya d'allumer la petite lampe de chevet, mais il l'en empêcha.
- C'est comme tu veux, de toute façon, je sais à quoi tu ressembles, dit-elle.
Marthe déposa sa bouteille de whisky, puis elle l'enlaça, il l'embrassa et il se sépara bientôt d'elle pour pouvoir se regarder la caresser. Marthe se laissa faire, mais bientôt, quelque chose la dérangea, quelque chose de froid qui lui parcourait le ventre, les jambes et le visage, ce n'était plus la main de son ami, elle releva la tête pour voir avec effroi la lame scintillante lui lécher la peau.
- Oh ! Arrête ! Je n'aime pas ça, ça me rend nerveuse, dit-elle.
Il continuait à lui parcourir le corps avec la lame en forçant un peu sur la pression cette fois. Marthe se mit à hurler, elle gigotait dans tous les sens pour essayer de s'enfuir, mais plus elle se débattait, plus il appuyait sur le couteau. Marthe arrêta de gigoter lorsque la main de son agresseur se referma sur son cou.
- S'il te plaît ! Laisse-moi ! Laisse-moi !
La lame descendait plus bas. Marthe continuait de supplier à gorge déployée.
- Fais moi entendre ta douce voix, chuchota l'inconnu.
Il enfonça la lame dans son vagin, déchirant le tissu de sa culotte, elle hurla quelques secondes avant de perdre sa voix. L'homme enleva ensuite le couteau très doucement, il se retira dans la pénombre et observa sa victime se convulser dans son eau de vie jusqu'à son agonie.

Kei

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