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Les Novices : Livre I - Chérubins sanglants (partie I)

Le jeune Adonis


Un


Son ombre se détachait du mur sali par le sang des innocents qu'elle avait torturés et bus. Sa silhouette pourtant, devançait son ombre malsaine qui, de ses doigts crochus, était prête à étrangler la première autre victime qui se présenterait. Tandis qu'elle traversait la cour du château sans presser le pas, l'ombre impatiente essaya de lui attraper le cou. La jeune femme s'arrêta alors et d'un mouvement infiniment lent, inhumain, elle tourna la tête vers le mur où se projetait cette ombre impudente. Elle prononça quelques mots en une langue inconnue et l'ombre alla se terrer dans les profondes fissures du mur, cherchant à se fondre dans ses aspérités.
Elle souriait, et son visage difforme, semblable à celui d'une bête féroce, s'éclaira. Elle continuait son chemin vers les écuries du château, elle volait presque sur le sol, on aurait dit que ses pieds ne le foulaient pas.
Elle tenait dans ses bras un jeune homme agonisant, le serrait contre elle comme s'il était son propre enfant, mais le sang sur ses lèvres était le sien. Le jeune homme était en extase, mais il revint vite à la réalité, ce monstre l'avait mordu à la poitrine, elle avait enfoncé ses crocs jusqu'au coeur, mais elle avait pris le soin de ne pas l'atteindre, parce qu'elle ne voulait pas qu'il trépasse, pas tout de suite.
Elle pénétra à l'intérieur de l'écurie, il y faisait sombre, et l'ombre mourut de nouveau au seuil des portes en bois. La créature s'arrêta, et jeta le jeune homme à demi mort à terre et patienta.
- Ne viens pas !, suppliait celui ci d'un souffle court. Il ressentait maintenant sa douleur à la poitrine, et il ne pouvait s'empêcher de pousser quelques cris, il s'obstinait à refouler ses larmes pour qu'elle ne vienne pas, mais "elle" était sortie quand même de sa cachette.
- Non, soufflait le jeune homme. Une jeune fille émergeait de son repère et malgré la peur que pouvait lui inspirer la créature, elle se précipita vers le corps du jeune homme et le redressa, il ne voulait pas, il ne le pouvait plus.
- Il est mort, dit une voix fluette, si douce que la jeune fille releva la tête vers son interlocutrice pour voir cette femme splendide, d'une beauté incommensurable, se tenir debout devant elle. La jeune fille en était bouleversée, elle lâcha l'agonisant et se leva devant une telle splendeur. L'apparition souriait et cela embellissait presque l'écurie.
- Tu as beau résister ma petite Lauralie, commença t-elle, tu ne peux pas me fuir indéfiniment, appartiens moi ! Appartiens moi! Je te désire tant, je veux que tout ce qui est à toi soit à moi, elle jeta un oeil sur l'agonisant, sa vie incluse.
La jeune fille sanglotait, émue, parce qu'on la désirait. Il était impensable qu'une pareille splendeur puisse l'aimer. Elle pleurait parce qu'elle savait qu'elle ne pouvait plus rien faire à présent.
- Lauralie, chuchota le jeune homme.
La créature ouvrait déjà ses bras. La jeune fille s'avança alors comme attirée par une force invisible, elle se serra tout contre la poitrine de sa belle étrangère qui se changea littéralement en une bête immonde et poilue. Entre la commissure de ses lèvres noires traînait un long filet de salive, la créature referma ses bras sur la jeune fille qui hurla, sortie trop brutalement de son rêve.


Deux


Il les sentait sur son corps chaud, curieusement, elles étaient froides, mais il n'y prêta aucune attention. Il embrassa goulûment la fille de joie qui se trouvait sous lui, qu'il pénétrait sans se presser, puis il l'embrassa plus tendrement. La deuxième compagne qui se trouvait couchée sur son dos émit précisément à ce moment un long gémissement, elle frissonnait, comme si, de façon totalement inexplicable, elle ressentait les mêmes émotions que sa camarade. Le jeune homme enfouit sa tête au creux du cou de celle qui était sous lui, elle rugissait presque, elle esquissa un sourire à l'intention de son amie, puis leurs langues se rencontrèrent.
- Non, pas de cela Mesdemoiselles !, gronda le jeune homme.
Elles lui souriaient. Le jeune homme embrassa sa deuxième compagne, elle lui lécha le cou, laissant paraître ses canines pointues, elle ne le mordit pas cependant, une voix menaçante le lui interdisait, elle recula mécontente et apeurée. Le jeune homme revint s'occuper de la première, elle fit jouer sa langue sur les lèvres de celui-ci, l'autre s'approcha de nouveau avec méfiance en passant rapidement ses yeux dans toute la pièce. Elles l'embrassèrent toutes les deux et cette fois le jeune homme ne fit rien, il se laissa faire, il en jouissait.
- Monsieur James, fit la fille de joie qui avait de superbes boucles rousses, nous sommes toutes à vos pieds, continua t-elle d'une voix sucrée qui faisait tourner la tête au jeune homme.
- Je suis à vos pieds Mesdemoiselles, rectifia t-il en se rhabillant.
Elles l'observaient en silence, assises sur le lit, enlacées comme une mère et sa fille. Il était fort séduisant, d'une innocente beauté, que l'on lui pardonnerait bien volontiers ses quelques péchés. Ses traits étaient fins tout comme ceux d'une femme, sa peau douce comme celle d'un nouveau-né, ses cheveux étaient longs et soyeux d'un blond brûlé, mais brillants et reflétant toutes les lumières du soleil, son corps était ferme. A tous points de vue, il était parfait, elles le savaient toutes, ils le savaient tous, pourtant il n'avait que seize ans.
- Monsieur James, dit la blonde aux cheveux raides, n'y a t-il aucune femme ou aucun homme, qui puisse faire battre votre coeur d'ange ?
Il prit place sur une des chaises en bois pour enfiler ses bottes.
- Je n'ai pas un coeur d'ange, je n'ai personne, répondit-il gravement.
- Allons, vous n'allez pas nous faire croire que vous n'avez personne, elles vous aiment toutes, toute l'Angleterre se vautre ici bas pour vous contempler, pour vous aimer, fit savoir la rouquine.
- Je suis égoïste Mesdemoiselles, je veux aimer, mais je veux aimer la perfection, la beauté.
- Quelqu'un qui vous ressemble?
- Oui, il se leva, et l'on rapporte que dans l'ancien château maudit des Keegan Miller, une belle étrangère s'est installée, est-ce vrai mes amours ?, demanda-t-il.
Elles acquiescèrent d'un sourire malicieux.
- On dit que sa beauté égale la mienne, continua t-il.
- Ceci aussi est vrai, confirma la blonde.
- Voulez vous la connaître ?
- Oui, répondit vivement le jeune homme.
- Monsieur James, assurément, elle entendra parler de vous, elle viendra.- Puis la rouquine leva ses yeux verts, d'un vert pur et inconnu du jeune homme. - Peut-être, Monsieur, qu'elle vous cherche aussi.
Il se tourna vers elles, un instant il crut apercevoir des formes qui ne ressemblaient plus à celles d'un être vivant, des formes douces, incroyablement blanches, mais si belles, Kurt leur souriait, elles firent de même.

Kurt traversa le petit village, il regagnait sa demeure, la tête pleine de ces rêves insensés, de l'immortalité, il voulait que sa beauté soit immortelle, qu'elle puisse traverser les âges sous l'égide de sa bien-aimée qu'il aimerait rencontrer, il souhaitait vivement qu'elle l'égale.
Une femme cachée sous sa capuche fine le suivait, elle avait attendu près de l'auberge qu'il descende enfin.
- Monsieur de Simplon Patrick !, fit-elle enfin avant de s'arrêter, et il en fit de même avant de retourner vers elle. Kurt adopta une expression grave, son front se plissa, la jeune femme poussa un cri étouffé à la vue de ce phénomène.
- Qu'avez vous ?, demanda Kurt alerté.
- Ne froncez pas ainsi les traits de votre visage si admirable, je m'en voudrais de vous avoir enlaidi en vous causant du souci, je me retire si vous le voulez.
- Mademoiselle de Valwade, j'étais sous l'effet de la surprise, il s'approcha d'elle le visage épanoui, ceci est passé, ne vous inquiétez plus, que me voulez-vous ma douce ?...
- Ne m'appelez plus ainsi, elle ferma les yeux prise de vertiges à son approche, je suis venue à vous parce que je vous aime Monsieur, puis elle leva les yeux vers ces yeux bleus aux éclats gris et vert, et il resta absent un moment, cependant son visage se fléchit, il devenait triste.
- Je ne puis vous aimer moi, je ne vous mérite pas Mademoiselle, j'ai la folie des jeunes adolescents et vous la sagesse d'une belle femme épanouie.
- Vous me trouvez belle, mais pas assez pour vous aimer, gronda t-elle. La jeune femme se maîtrisa bien vite, elle enleva sa capuche, laissant paraître son visage rose, sa longue chevelure brune et épaisse qui tombait en cascade, sur son visage si frais, sa bouche n'était pas fine, mais elle plaisait à Kurt qui aimait jadis les mordre doucement, elle pleurait sans sangloter ni gémir, elle semblait digne.
- Si la beauté est votre seule compagne, je serais beauté, si je dois être une de vos filles de joie pour que vous daigniez poser les yeux sur moi de nouveau, je deviendrais une de ces filles, mais je vous en prie, ne m'ignorez plus, je vous aime, qu'ai-je fait pour que vous me délaissiez ? Si vous êtes infidèle, je n'y accorderais aucune importance, du moment que je sois la première à qui vous accordez vos faveurs, elle baissa ensuite les yeux et se jeta à son cou, docilement, m'aimez-vous ?
Kurt ne répondit pas tout de suite, il est vrai qu'elle était belle et que l'amour qu'elle lui portait le fascinait, mais elle n'était pas comme lui, et des femmes aussi bien que des hommes essayaient chaque jour de lui soutirer des faveurs, eux aussi l'aimaient, mais elle...
- Bonsoir !
Cette voix si douce ?... Elle interrompit les deux anciens amants, et Kurt se tourna vers elle. Mademoiselle de Valwade écarquilla les yeux tant elle n'y croyait pas. Kurt s'en réjouissait, les deux filles de joie ne lui avaient pas conté fleurette. Cette magnifique femme aux cheveux longs et si patiemment bouclés se tenait là devant eux dans une de ses plus belles toilettes en mousseline. Ses traits étaient aussi fins que ceux de Kurt et son visage aussi beau et aussi doux que le sien, ses sourcils étaient minces et bien rangés, son sourire irradiait la nuit en un éclat, c'était presque une vision.
- Je suis la comtesse Valérie de Goodelfman, cousine de la comtesse Rawskassie Anastass de Hongrie. Je suis la nouvelle châtelaine qui occupe dorénavant l'ancien "castel" des Keegan Miller, dit-elle.
- Mais cette demeure est maudite, intervint Mademoiselle de Valwade d'un souffle, de peur de voir disparaître l'illusion.
- En quoi est-elle maudite très chère ? demanda la châtelaine d'un sourire malicieux.
- Les Keegan Miller ainsi que toute leur cour ont étrangement disparu, ceux qui y sont allés, n'en sont pas revenus ou sont devenus fous.
- Des contes de fées ! lança la comtesse le sourire aux lèvres. Mademoiselle de Valwade en fut très affectée.
- Je suis enchanté ! Je me présente comme étant votre serviteur, Monsieur Kurt Simplon Patrick.
Elle le considéra le sourire toujours sur les lèvres, elle s'approcha de lui, d'une lenteur si irréelle que Kurt et Mademoiselle de Valwade en restèrent étonnés mais charmés.
- Quel âge avez vous Monsieur ? demanda la comtesse.
- Seize ans, Madame.
- Vous n'êtes encore qu'un enfant, constata t-elle. Il se vexa, mais n'en laissa rien paraître, elle en serait que trop fière. La comtesse se tourna ensuite vers Mademoiselle de Valwade qui resta figée sur place par ce regard qu'elle daignait lui imposer.
- Votre compagne ? demanda t-elle à Kurt sans quitter Mademoiselle de Valwade des yeux le sourire accroché.
- Non, une simple amitié, répondit-il.
Mademoiselle de Valwade en fut profondément touchée, c'en était trop pour une nuit, elle remit sa capuche.
- Je vous salue, souffla t-elle avant de leur tourner le dos et de s'éloigner à grand pas de ces tortionnaires.
- Elle a l'air blessée, fit la comtesse en ne la quittant toujours pas des yeux.
- Il n'en est rien, fit Kurt.
Elle se tourna vers lui.
- Voudriez vous me raccompagner à ma calèche ? demanda t-elle.
- Avec une immense joie Madame.
Elle posa son bras sur le sien, et ils se dirigèrent vers la calèche qui se trouvait à l'entrée du village.
- C'est une histoire qui remonte déjà à huit ans vous savez, commença Kurt ne sachant que dire d'autre.
- Vous voulez parler des Keegan Miller, dit-elle en écorchant sa phrase avec un petit accent. Kurt trouva cela charmant.
- Oui, répondit-il, la fille du comte rentrait de son voyage de noce avec un très éminent baron du sud, elle n'avait que quinze ans alors, mais chose étrange, ces deux là s'aimaient.
- Quel était l'âge du baron ?
- Il allait sur ces vingt cinq ans, terrible n'est ce pas ?
Ils étaient arrivés devant la calèche. Le cocher qui était couvert de la tête au pied, descendit pour ouvrir la porte à la comtesse, il était bien petit de taille, Kurt s'en étonna, mais la comtesse l'obnubila de nouveau avec sa si douce intonation et son accent.
- L'âge vous savez n'a aucune importance, vous êtes bien jeune, et pourtant vous m'aimez déjà, moi qui ai l'âge d'être votre mère.
Elle disait vrai.
- Il est vrai que je ressens pour vous quelques attirances, mais vous êtes si belle, avoua Kurt.
La comtesse monta dans la calèche sans aide, elle n'en avait nullement besoin. Le cocher regagna ensuite sa place à l'attelage. La comtesse s'accouda à la petite fenêtre.
- Vous et moi sommes faits pour vivre l'éternité ensemble, nous représentons la beauté même, je souhaite que vous me rendiez visite une fois, dit-elle.
- Plus d'une fois Madame.
Le cocher fit claquer son fouet sur le dos des chevaux, la comtesse souriait de nouveau à Kurt, son coeur se souleva devant une telle faveur. La calèche s'éloigna dans l'ombre, dans un silence hors du commun, mais Kurt était si émerveillé qu'il ne prêta aucune attention aux ombres immondes qui se détachaient rapidement du mur rouge.


Trois


Il était bien tôt lorsque Kurt se décida à se lever. Il fit sa toilette tellement plus soigneusement que d'habitude, que sa mère croyait qu'il allait enfin se décider à chercher du travail.
- Tu t'es trouvé une bonne besogne mon garçon ? demanda t-elle, assise sur sa chaise à bascule.
- Oui mère, mentit-il.
Elle en était si heureuse que son fils en fut torturé de remords, puis il quitta la maison le coeur bien serré, un cottage charmant, mais pas assez riche à son goût pour sa famille. Dehors, sa petite soeur jouait avec un chat perdu. Lorsqu'elle l'aperçut si bien vêtu, elle se précipita vers lui.
- Kurt ! Où vas-tu ?
Il s'arrêta pour s'agenouiller en face d'elle, il l'aimait tant, elle avait hérité de sa beauté, il s'était juré qu'aucun homme ne devra la courtiser sans passer par lui.
- Douce Cassie, je m'en vais trouver une belle demoiselle, lui répondit-il.
- Vas-tu voir Delphine ?
- Non, Mademoiselle de Valwade n'a plus l'envie de me voir.
Sa petite soeur prit un air de mécontentement, seule sa bouche s'exprimait en une moue infantile.
- Tu lui as encore fait du mal, accusa-t-elle d'un ton si provocant que Kurt en fit que plus admiratif.
- Elle ne me mérite pas Cassie.
- Et celle que tu vas séduire te mérite, elle ?
- Oui, répondit-il sincèrement.
Elle lui souriait de nouveau.
- Tu me la présenteras ? demanda t-elle.
Kurt se redressa.
- Oui, sûrement.
- Est-elle jolie ?
- Plus que n'importe quel champ de rose.
Elle en fut émerveillée rien qu'à l'entendre dire de la bouche de son frère.
- Ne dis rien à maman, et je te ramènerai un petit cadeau, dit-il en s'éloignant.
- Oui, gloussa Cassie.

Kurt gravit à pied la colline qui menait au château de la nouvelle châtelaine de ces lieux. Les alentours étaient calmes et silencieux, personne ne semblait émettre un son. Mais où était le reste de la cour ? Les domestiques ? Madame de Goodelfman ? Kurt ne trouva personne, l'endroit était désert. La comtesse lui aurait-elle menti ?
- Que faites-vous ici ? lui demanda-t-on.
Kurt se tourna vers la jeune femme en haillons. Elle était maigre, si frêle, et ses longs cheveux raides, qui paraissaient avoir un semblant d'ordre, cachaient la moitié de son visage qu'elle dissimulait encore plus en baissant la tête à demi. Quelle étrange femme !
- Je... Je cherche la comtesse.
Elle semblait rire, se moquer de lui.
- Tout le monde la cherche vous savez, vous n'êtes pas le seul.
- Puis-je la voir ?
- La comtesse est absente, le jour, elle est très prise par son travail, lui répondit la jeune femme.
- Une comtesse peut donc être riche et avoir quelques déplaisantes besognes ?
- Oui, jeune garçon.
- Qui êtes vous ? lui demanda Kurt.
Elle baissa la tête et Kurt ne la vit plus du tout.
- Je suis afférée à son service, lâcha-t-elle doucement.
- Une domestique ?
- Oui, chuchota-t-elle.
- Quand alors pourrais-je la voir ? demanda Kurt.
- Ce soir Monsieur.
- Ne sera t-elle point éreintée ?
La jeune femme ria alors, plus distinctement sans pour autant relever la tête.
- Non, Monsieur, c'est le soir que Madame se sent le plus revivre.
Kurt fronça les sourcils, il la trouvait curieuse.
- Je repasserai donc ce soir.
Sans lui dire au revoir la jeune femme retourna à son travail, elle attrapa la bêche qui se trouvait cachée parmi les mauvaises herbes du jardin qui se trouvait autour du château. Kurt eut pitié d'elle, elle semblait être seule pour s'occuper de toute cette faune et ses haillons ne la protégeaient nullement du mauvais temps.
- Mademoiselle ! fit-il en enlevant son gilet. Elle se tourna vers lui tremblante. Il s'avançait.
- Mettez ça ! dit-il en lui tendant le gilet.
Elle hésita, mais le vent mordait si fort chaque membre de son corps qu'elle l'accepta. Elle l'enfila et se sentit tout de suite bien mieux, elle releva la tête toujours à demi.
- Merci Monsieur.
- C'est une peau de mouton, j'ai tué moi-même l'animal, gardez le, dit-il très fier, je vous salue !
Kurt s'en retourna, il s'éloigna du château. La jeune femme se dirigea alors vers l'énorme gargouille en pierre qui se trouvait au fond du jardin cachée par quelques feuilles mortes. Elle se blottit contre elle et s'assoupit, réchauffée par la peau de mouton.


Quatre


Kurt se rendit auprès de ses filles de joie qu'il appréciait tant. Il monta les escaliers de l'auberge qui semblait bien vide ce soir là, il n'y avait pas de client ni de patron.
- Miss Clémence ? Miss Stéphanie ? appela t-il.
Kurt se dirigea vers la chambre où il se trouvait hier soir, puis il gratta doucement le bois.
- Miss Clémence ?... Miss Stéphanie ? chuchota t-il.
Pas de réponse pendant un long moment, alors il décida d'entrer, mais la porte s'ouvrit d'elle-même et Clémence, la rouquine, fit son apparition. Elle se présenta nue, ce qui fit sourire Kurt.
- Il faut bien innover, est-ce un bordel ? Ou une cour pour enfants ? se justifia t-elle en lui souriant.
- Vous avez raison, chuchota Kurt en contemplant ce corps si blanc, si parfait, elle avait des yeux verts comme ceux d'une poupée, un regard triste qui devait être la cause d'une grande peine jamais éteinte, et un sourire faussement joyeux, presque malsain, mais qui lui allait bien, trop bien.
- Si je n'étais pas tombé sous le charme de la comtesse, je serais pour toi et ton amie le plus fidèle amant que l'on ait jamais vu, ajouta-t-il.
- Vous avez alors vu cette chère comtesse, dit-elle en lui attrapant la main, elle nous a alors devancé.
Clémence l'entraîna dans la chambre sombre, toujours éclairé par une seule bougie.
- L'aimez-vous ?, demanda-t-elle en s'asseyant avec lui sur le lit.
- Oui, répondit-il.
- Une seule fois vous a suffi.
- Où se trouve votre compagne ?, demanda Kurt.
- Elle dîne, répondit-elle avec une irrépressible envie de rire à gorge déployé.
- Qu'est ce pour vous la sensualité, Monsieur de Simplon Patrick ?, demanda-t-elle ensuite.
- C'est vous, répondit-il en s'attardant sur le petit triangle pubien roux à demi caché par ses cuisses, elle le vit et écarta alors les jambes pour qu'il puisse voir.
- J'ai envie de vous, fit Kurt en levant ses yeux émerveillés vers elle.
Clémence riait enfin. Kurt sentit la pointe de ses seins et son corps tout entier contre son dos, elle n'émettait aucune chaleur, mais il n'y fit toujours pas attention. C'était la blonde Stéphanie qui se trouvait derrière lui et qui lui offrait milles baisers au creux du cou. Clémence se mit à rire plus fort, et lorsque les crocs s'enfoncèrent dans sa chair, Kurt poussa un cri rauque, il ferma les yeux, et fut pris d'extase. La douleur lui était inconnue, il se sentait terriblement mieux, il aimait ça. Clémence s'approcha de lui pour le mordre à son tour dans l'autre bord de son cou, mais on l'en empêcha, elle se sentit mal à l'aise tout d'un coup. Stéphanie fut prise de la même panique, elle lâcha Kurt qui râla, il commençait à avoir mal, cette étreinte il aurait voulu qu'elle dure toujours, il tomba comme une masse sur le lit.
Clémence et Stéphanie reculèrent apeurées, elles se cachèrent derrière le lit, en poussant des grognements.
La porte en bois s'ouvrit sur la comtesse, le visage défiguré par la colère.
- Qu'avez-vous fait bande de sottes ? Je vous l'avais interdit, il est à moi, gronda t-elle.
Elles se mirent à montrer les crocs pour vaincre leur peur.
- Ce jeune Adonis ne doit pas seulement vous appartenir, son sang est le meilleur qui soit, laissez moi m'en abreuver, je ne le tuerai pas, je vous le laisserai ensuite, fit Stéphanie.
Un grognement retentit de la gorge de la comtesse, son visage redevint splendide et passif. Elle s'avança vers le lit et souleva dans ses bras Kurt, qui se trouvait plongé dans son délire.
- Il est à moi, et vous me devez un peu plus d'obéissance, car rappelez-vous bien mes enfants, je suis votre seul juge, menaça-t-elle avant de disparaître avec le corps.

Kei

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