Réécrire un conte : La Petite Pelote Rouge

Elle était petite, ronde et rouge. Surtout rouge. Elle était encore jeune selon les critères de son peuple. Jeune et fragile. Et elle était si petite. Le chat lorgnait souvent en direction du panier dans lequel elles étaient regroupées. Heureusement les humains veillaient et il ne pouvait pas les attraper pour en faire de vulgaires jouets. Les plus anciennes étaient régulièrement employées par la grand-mère qui habitait là et c'est ainsi que les plus âgées disparaissaient parfois après avoir rendu un dernier service. Et la petite pelote rouge était toujours là. Toujours aussi petite et fragile. Elle appartenait à une petite humaine, très jeune elle aussi selon les critères des siens. La petite fille voulait apprendre l'art du tricot mais ses mains encore trop fines ne pouvaient manipuler la laine correctement et elle n'était pas encore autorisée à utiliser sa petite pelote rouge. Cette dernière demeurait donc dans le panier.

Un jour que la grand-mère tricotait et que le chat cherchait de quoi s'occuper, le panier fut laissé à sa portée et il essaya de sauter dedans pour attraper tous ces jouets interdits. La grand-mère le chassa et le gronda avant de remettre le panier hors de sa portée. Elle n'avait malheureusement pas vu qu'une des pelotes avait été emportée et avait roulé hors du panier sous un meuble. La petite pelote rouge. Le chat l'avait quant à lui bien vue mais il savait qu'il devait attendre son heure pour ne pas se faire remarquer une seconde fois. La grand-mère finit par ranger ses tricots et ses pelotes pour préparer le repas, libérant ainsi le chat de son attente. Il s'approcha lentement de la pelote. Très lentement. Puis il sauta dessus, la frappant de ses pattes et la rattrapant, l'entraînant dans ses roulades et ses courses folles. Le jeu dura quelques temps. Jusqu'à ce que la petite pelote rouge échappe au chat et roule sous la porte. Le chat ne pouvait plus ni la suivre, ni l'attraper.

La maison de la grand-mère était construite sur une petite butte au bord d'une forêt de chênes et de hêtres. Le sentier qui permettait d'atteindre la porte montait lentement de telle sorte que pour atteindre la porte il fallait faire un tour complet de la maison. Ainsi, la pelote roula lentement le long du sentier, rebondissant ça et là sur des cailloux si grands par rapport à elle. Elle ne s'arrêta toutefois pas.

Pendant ce temps, le chat s'était lassé d'essayer de rattraper la pelote sous la porte et il avait choisi de passer par la fenêtre de la cuisine, toujours ouverte lorsque la grand-mère cuisinait. Il arriva finalement au bout du sentier au pied de la butte, espérant y retrouver la petite pelote rouge. Il ne trouva toutefois qu'une vieille pelote abandonnée là quelques temps plus tôt par la grand-mère. Elle espérait ainsi que son chat laisserait les pelotes de son panier tranquille. Ce dernier retrouva donc cette vieille pelote et il entreprit de la mettre en pièces pour se remettre de sa frustration. La petite pelote rouge était un très joli jouet mais il l'avait apparemment perdue.

La petite pelote rouge continuait son petit bout de roulade et elle finit par arriver à son tour au pied du sentier. Une fois la pente disparue, elle s'immobilisa. Le chat se reposait tout à côté, entrouvrant à peine les yeux de temps en temps pour ne pas rater un éventuel nouveau jouet. Des bouts de l'ancienne pelote étaient dispersés ça et là. Il en avait fini avec elle. Puis il vit la petite pelote rouge. Il se releva lentement. Il s'étira, sortant puis rentrant ses griffes, remuant ses oreilles et dévoilant ses fines dents. Enfin il s'avança vers la petite pelote égarée. Il s'apprêtait à se jeter dessus pour la mettre en pièce à son tour. C'est qu'elle l'avait fait courir celle-là. Ce fût un caillou, lancé avec une dextérité certaine, qui l'arrêta. La jeune fille venait rendre visite à sa grand-mère et elle trouvait sa précieuse pelote dehors. Pas question que le chat la touche et la démembre. Le chat ne demanda pas son reste, il fila se cacher dans la forêt.

La petite pelote rouge fût donc sauvée et ramenée dans son panier. Elle finit là son existence, quand la jeune fille put enfin l'utiliser à ses premiers tricots.