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Dune (cycle) : 5 Commentaires

* Genre

Dune est une épopée de science fiction d'une ampleur et d'une profondeur considérable, s'étendant sur plus de 15 000 années et sur pas moins de sept livres, où Frank Herbert se penche sur de nombreux sujets, comme la religion, la nature du temps, la prescience et la politique, l'écologie... Autant de thèmes qu'il aborde sous des angles inhabituels et avec une pertinence rare. Dans un désert qui s'étend sur presque toute une planète, où tout tourne autour de l'eau et de la religion, le dépaysement est total. Mais Dune, c'est aussi des paysages grandioses qui nous sont dépeints, car le désert profond a sa beauté propre, et des chevauchées qui font rêver... Cette oeuvre nous emmène vivre dans une société extrêmement complexe aux nombreuses factions dans un équilibre précaire, maintenu à force de manipulations politiques à double tranchant et de complots, où être noble signifie aussi ne jamais goûter à un plat sans avoir d'abord vérifié qu'il n'y avait pas de poison... Face à cette suspicion constante, la confiance totale qu'accordent les Fremen à ceux de leur peuple fait un contraste brutal, tout comme leurs pensées allant droit à l'essentiel dictées par les nécessités de la vie dans le désert. Vivre parmi ce peuple, c'est à la fois vivre dans des conditions extrêmes en étant presque démuni quoique très avancé technologiquement, et vivre complètement en sécurité au milieu de dangers fatals... Cultivant les ambiguïtés, les Fremen ne cessent de surprendre et de faire rêver. Les cultures rencontrées, qui se sont développées sur une dizaine de milliers d'années sont encore plus disparates que celles que nous avons sur Terre, peut être plus complexes et certainement plus étranges... Dune surprend aussi par l'astuce dont font preuve beaucoup de personnages. Un simple combat au couteau peut ainsi devenir un véritable duel psychologique, où chacun dissimule ses capacités réelles, en faisant croire à l'ennemi quelque chose de légèrement différent de la réalité, tendant des pièges à l'intérieur de leur propres pièges... Dans ces conditions, les complots se mettent à ressembler à de véritables poupées russes, et donnent le tournis par leur complexité...

* Scénario

A part les deux premiers livres qui ne sont pas vraiment séparés, chaque tome possède son propre scénario. Les 4 premiers se déroulent sur une période de temps relativement courte, environ 20 à 25 ans, mais le 5ème se déroule cinq mille ans plus tard, et les suivants environ dix mille ans encore après. Chacun d'entre eux est nettement différent des autres, mais tout continue de tourner autour de Dune, et surtout, de l'épice gériatrique. Car, comme le fait remarquer Paul, qui contrôle Dune, contrôle l'épice, et qui a la main mise sur l'épice contrôle l'univers. L'enjeu est donc inimaginable et les alliances les plus folles naissent pour renverser l'équilibre des forces, les traîtrises sont multiples, chacun s'assurant d'un moyen de discréditer voire de se débarrasser de son allié du moment une fois que le complot sera réussi. Avec un univers de cette taille, les puissances importantes sont nombreuses, et chacun voit un chemin différent pour parvenir au but qu'il recherche. Qu'on ne s'imagine pas pourtant que tout les scénarios sont simplement basées sur des tentatives de prises de pouvoir. C'est bien plus compliqué que ça, car dans une société aussi complexe, il existe bien des manières de contrôler plus avantageuse que celle de détrôner un dirigeant...
Seul problème : Herbert a parfois passé de longues années avant d'écrire un nouveau tome, et cela se ressent par quelques incohérences, notamment entre les tomes trois et quatre, car ce dernier voit par exemple son histoire principale se servir comme base d'un élément qui est en contradiction avec ce qui fut dit dans le volume précédent... Mais aussi, des détails moins importants à l'intérieur d'un même tome, comme l'oubli de l'effet pernicieux dû à la présence permanente de l'épice dans l'air d'Arakis pour certains personnages qui quittent de façon prolongée la planète. Plusieurs erreurs regrettables donc, mais qui sont vite effacées par la complexité permanente du scénario.

* Personnages

Herbert met en scène des personnages qui repoussent sans cesse les différentes limites de l'humanité, soit par leur apparence physique, comme l'Empereur Dieu, les guildiens ou Scytale, le danseur-visage Tleilaxu, soit par leurs capacités mentales, comme les mentats et Muad'Dib, ou même encore simplement par leurs capacités physiques hors du commun, à l'exemple de Duncan Idaho et du Bene Gesserit, ou de manière plus conventionnelle, par leur cruauté, le summum étant atteint dans ce domaine par le Siridar-Baron Vladimir Harkonnen... De tels extrêmes appellent forcément des personnalités hors du commun, aux tournures d'esprit elles même parfois peu humaines, qui achèvent de faire de Dune un cycle à part. Parmi tous les personnages que l'on rencontre, qui n'est pas humain ? Est ce vraiment le physique le critère plus important, ou l'humanité n'est elle pas plutôt un concept moral?
Les Fremen démontrent une fois de plus que simple n'est pas forcément synonyme d'arriéré ni de faible intelligence. Leur société complexe modèle leur état d'esprit de façon profonde, leur inculquant des valeurs morales différentes de celles de notre société, des tabous qui leurs sont propres.

* Sentiments

Amour, haine, jalousie ou concupiscence, un cycle de l'ampleur de Dune comprend évidement toute la palette de sentiments humains, des plus détestables aux plus nobles d'entre eux, mais avec la présence de personnages aux limites de l'humanité, de nouvelles émotions apparaissent, comme l'empathie totale des danseurs-visages pour leur victime ou le sentiment d'avoir perdu son humanité, et certaines d'entre elles prennent des tournures inattendues, aux amplitudes parfois effrayantes...

* Qualité du background

Des dizaines de milliers d'années d'histoire et de mondes, des guerres où l'on compte les victimes par milliards, des créatures qui font plusieurs centaines de mètres, des vaisseaux de plusieurs kilomètres de long, des Empires qui durent des milliers d'années... Les chiffres avec lequel joue ici Frank Herbert sont hors du commun, à l'image de la richesse foisonnante du background, qui n'a tout simplement pas d'équivalent en science fiction actuellement. Je pourrais passer des heures à en parler et ne donner ainsi qu'un simple aperçu de sa complexité. En 10100, l'univers des hommes a été marqué par de nombreux événements qui ont déterminé son état actuel. Par exemple, la prise du monopole spatial par la Guilde en est une, puisque celle ci c'est ainsi mise en position d'arbitrer les conflits entre les maisons. L'invention du bouclier, champ invisible capable d'arrêter n'importe quel projectile, et réagissant très vivement lorsqu'il est percuté par un laser (une double explosion nucléaire de taille très variable se produit alors, pouvant ne détruire que la cible et le tireur comme toute une ville) a conduit à un retour partiel aux combats à l'arme blanche. Et le Jihad Butlerien est à l 'origine de l'interdiction formelle de construire des machines possédant une IA (selon le credo : "tu ne construiras pas de machines à l'esprit de l'homme semblable"), et du développement d'une caste "d'ordinateurs humains", les mentats, hommes formés dès leur plus jeune âge capables d'utiliser leurs esprits pour computer des informations à une vitesse dépassant celles des machines qu'ils ont remplacé...

K.O.Ru

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