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Nosferatu

Nosferatu : 3 Avis

Nosferatu, eine Symphonie des Grauens a été réalisé 2 ans après Le cabinet du Dr Caligari (Robert Wiene), sorte de manifeste de l'expressionnisme allemand. Les visages sont défigurés, exagérément effrayants. Les décors, pourtant, sont loin d'être étranges et amputés. Il se pourrait que quatre films soient véritablement de la veine de l'expressionnisme de par leurs décors surtout, en rapport avec les peintures de Kandinsky, du groupe "Der Blaue Reiter" (Le cavalier bleu) : Le Cabinet du Docteur Caligari, Faust de Murnau, Metropolis de Fritz Lang, Nosferatu de Murnau Cette forme vient d'une révolte contre l'école française des impressionnistes. L'expressionnisme lui expose des formes dures, agressives, volontiers caricaturales, un romantisme horrifiant, une recomposition de l'espace et du réalisme. Ainsi, c'est par la stylisation géométrique du décor, des nuances ombre et lumière, l'emploi du clair-obscur, la raideur des gestes, et surtout l'ambiance "démoniaque" des films que le jeu de ce mouvement significatif prend son ampleur.
Nosferatu, le personnage que joue Max Schreck (et non Murnau contrairement à la rumeur) est à lui seul une architecture de l'expressionnisme, sa raideur, son visage diabolique, sa largeur, sa minceur et ses yeux brillants, sa figure pâle, il ressemble à une charpente et nous glace littéralement le sang. L'ambiance du film est malsaine à souhait et certaines longueurs permettent aux spectateurs de s'immerger dans une époque, un lieu inconnu. Certaines rumeurs avancent que Nosferatu aurait prédit la montée du nazisme, de ce dangereux petit bonhomme moustachu et inquiètant qui vampirise les foules, tout comme le film Metropolis (mais la réflexion y est plus flagrante).
Il y a beaucoup de passages marquants de ce film retrouvés et reconstitués, celle de la rencontre avec Hutter, où l'on aperçoit cette forme, cet être étrange presque écoeurant qui se déplace avec la raideur d'un mort et qui ne ressemble à aucun autre personnage. Cette apparition a quelque chose d'hypnotique.
La scène sur le bateau est évidemment un must, dans la cale surtout, où l'on voit ce cercueil rempli de terre, lorsque les membres de l'équipage tombent gravement malades et meurent un à un ; les membres restant accusent alors ce cercueil et vont le détruire ; d'un coup de hache, ils libèrent des rats, et chose merveilleuse, effet grandiose du comte qui se redresse tout raide, le visage terrifiant, une horreur qui à l'époque a dû en faire tomber plus d'un.
La dernière scène est marquante et bourrée de significations romantiques, car le comte Orlok subjugué par la beauté de Nina, ne voit pas se lever le soleil et se retrouve piégé. Le plan du soleil est mémorable car il illumine ce film plongé dans la noirceur depuis le départ.
Murnau a beaucoup joué avec la lumière et les ombres du film, les personnages peuvent s'y cacher et créer une attente ou un suspens.
Pour l'époque, les effets comme la disparition de la diligence fantôme, l'apparition du comte, comme surgi de nulle part, et l'utilisation de l'image en négatif qui noircit le ciel et blanchit le paysage étaient de véritables exploits et avaient un réel impact. Murnau accumule les effets morbides comme les cercueils, les processions funéraires, les croque-morts, les pestiférés, les rats porteurs de maladies, les cimetières, une véritable obsession pour la mort, pour l'imaginaire expressionnisme (voir le peintre Edward Munch plus tard). Révolutionnaire, (tout comme dans le film muet Dr Jekyll et Mister Hyde de John S. Robertson), Murnau va inclure dans son film des organismes, des cellules que l'on observe en laboratoire au microscope.
Un grand chef d'oeuvre.


Note : 20.

Kei

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