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L'Empire des Sens

L'Empire des Sens : 3 Avis

Il est vrai que ce film peut vite être taxé de film érotique, mais c'est sans compter qu'il y a une recherche de l'esthétisme et une volonté de poésie dans un monde duquel les deux amants veulent s'extraire. Ils vivent pour eux-mêmes, d'eux-mêmes, loin d'une réalité sans doute trop banale ou cruelle, et se réinventent passionnément à travers un amour foudroyant et maladif. Le sexe se passe comme une pièce de théâtre, il est rendu comme un spectacle presque tragique. On dirait que le théâtre de Nô et le Kabuki qui sont traditionnels, transparaissent dans chaque film japonais, la beauté et la pesanteur de la musique, les masques tristes, une lenteur magnifiées par les personnages qui semblent jouer des poupées ou des fantômes.
Le film a provoqué dès sa sortie un scandale dû à sa pornographie, et pendant très longtemps, on montrait L'Empire des sens avec un énorme cache noir. Ce film a sûrement permis au cinéma asiatique d'acquérir une grande notoriété après les films d'Akira Kurosawa.
Il y a entre Sada et Kichizo un amour drôle qui recherche toute sortes de fantasmes à réaliser, à mimer, à transcender, comme cette scène où Kichi lèche le sang menstruel de Sada, ou encore celle où il lui met un oeuf au fond du vagin et qu'elle doit le pondre, ou, plus théâtral, la scène du mariage, où Sada joue la jeune vierge qui va se faire dépuceler.
C'est la passion orchestrée qui est ici mise en scène par Nagisa et une question sans doute sur les limites de l'acte sexuel, les limites de l'amour qui engendre parfois une folie douce.
C'est un très beau film, un hymne à la liberté, mais un cruel constat sur le fait que l'amour n'est pas éternel. Cette histoire serait tirée d'un fait divers populaire sur cette jeune femme qui émascula son amant pour le garder encore auprès d'elle. Bizarrement, il paraît que cette "légende" n'a pas vraiment scandalisé, mais a ému le public...
Il y a aussi une référence historique dès le début du film, quand Kichi rencontre un régiment de soldats : on a une référence à la mutinerie des régiments d'infanterie en 1936, 1400 hommes qui seront finalement contrés et exécutés, car le Japon est un pays rigoureux avec des lois à appliquer sans en discuter les ordres.
La jalousie, la méchanceté, les sentiments, le désir, la rivalité sont traduits dans un film aux images superbes pour l'époque et même aujourd'hui. Si Oshima était un lecteur assidu du Marquis de Sade, il n'en reste pas moins qu'il a été juste et n'a pas trop exagéré sur sa vision de l'amour.


Note : 18.

Kei

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