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Interviews : Interview Florent Maudoux

Interview réalisée par mail la semaine du 28 juillet 2008 et lors de Japan Expo 2008, le dimanche 6 juillet 2008 (voir le compte-rendu), pour la partie « 5 Questions à la con ».

Japan Expo a été riche en rencontres avec de jeunes auteurs tous plus géniaux les uns que les autres.
Florent Maudoux, dont la première BD vient juste de sortir, nous a fait l'immense gentillesse de répondre à nos questions.

yadana pour TSD : Peux-tu te présenter rapidement ?

Florent Maudoux : Rapidement ? Heu...
Bonjour, je suis Florent Maudoux, malheureusement indisponible auprès de ces demoiselles car je suis déjà en couple.
Voilà ^^.

Peux-tu nous parler un peu de ton parcours professionnel ?

J'ai fait des études de maths avant d'entrer aux Gobelins en section animation.
Ensuite j'ai bossé dans le jeu vidéo chez Eden Games sur Kya, Titeuf et Alone in the dark 5 (animation 3D, storyboard), puis dans l'illustration et le concept de figurines dans l'univers médiéval fantastique chez Rackham.
Sans cracher dans la soupe, je n'ai jamais trouvé de poste aussi épanouissant que celui d'auteur de BD.

Freaks' Squeele 1Le tome 1 de Freaks' Squeele est sorti début juillet. Peux-tu nous présenter ta série ?

C'est l'histoire de trois étudiants apprentis héros dans une école assez particulière.
Il y a Chance la démonette aux battements de cils qui font l'effet papillon, Ombre le loup-garou au grand coeur qui est coincé sous sa forme bestiale et Xiong Mao la fille qui n'a aucun pouvoir particulier, mais qui compense par ses connaissances théoriques.
Cours divers et variés qui servent plus à montrer ses pouvoirs qu'à les maîtriser (marketing, costume, etc.), profs sadiques et inventifs et épreuves délirantes sont au programme.

Qu'est-ce qui t'a donné envie de faire une série dans l'univers des super héros ?

Super hero, action hero, tactical hero, crafter hero, etc.
En fait je veux traiter de l'héroïsme en général. On veut tous devenir des héros à notre manière, être reconnus pour ses talents, être aimés...
Les super pouvoirs sont quant à eux intéressants car ils permettent de transformer une situation banale en combat homérique. Chaque sentiment, situation ou crise est exacerbé; c'est tellement plus drôle à raconter.

A la fin du tome 1, tu expliques l'origine de « squeele ». Peux-tu nous en dire plus ? Pourquoi ce titre ?

La magie de ce mot. Il est apparu grâce à une bourde de graphiste, c'est un peu comme la pomme de Newton ou l'invention de la pénicilline...
Un mot valise qui a la signification qu'on veut bien lui donner.

Freaks' SqueeleFreaks' Squeele est truffé de références. Est-ce pour ajouter des niveaux de lecture différents et/ou pour t'amuser (et amuser le lecteur qui les trouve) ?

Je place des références sans même y réfléchir, pour moi c'est une sorte d'hommage.
Je recherche aussi la complicité avec le lecteur : si on trouve une référence dans une oeuvre, on se dit qu'on a les mêmes lectures, les mêmes goûts (de chiotte ?), le même état d'esprit que l'auteur... En même temps je ne voulais pas que ces références deviennent envahissantes et perturbent le récit. J'ai soigneusement évité la parodie.

Comment s'est déroulée la réalisation du volume 1 de Freaks' Squeele ?

Comme sur des roulettes, c'est le moins qu'on puisse dire.
Le staff Ankama m'a laissé toute liberté quant au format et au contenu.
J'ai pu tranquillement écrire le scénario à ma façon car il n'y a pas de validation par étape, je suis libre comme l'air.
J'ai pu valider mon objectif qui était de réaliser un album en moins de 7 mois. Du coup, le lecteur n'aura pas trop à attendre entre deux albums. Pour moi, c'était important.

Peux-tu nous raconter une de tes journées type de travail sur Freaks' Squeele ?

J'écris le scénario à l'avance, et lorsque je m'en sens l'inspiration je travaille le storyboard.
Pour ces étapes, je demande l'aide de ma compagne qui me corrige et m'a sorti plus d'une fois d'une impasse scénaristique.
Ensuite, une journée typique commence par la mise en place de la page sous Photoshop. Là je peux bosser les proportions des cases au millimètre près, changer éventuellement les cadrages. Je place aussi les textes.
Ensuite, je passe à l'encrage et au tramage sous MangaStudio.
Vers la fin de journée, je repasse sous Photoshop avec lequel je place les niveaux de gris ou certains décors qui peuvent se passer d'encrage. S'il y a de la couleur, je place des couleurs comme sur un livre de coloriage et le vendredi j'attaque la mise en lumière des pages faites pendant la semaine (j'ai donc un meilleur rythme en n&b qu'en couleur).

Comment qualifierais-tu ton style graphique ?

De très français!
Au final, je suis un enfant de ce carrefour d'influences qu'est la France ; le manga, le comics et le franco-belge font partie intégrante de ma culture.
Après, j'ai peut-être cette manière de travailler mon dessin comme certains travaillent le vin ou le fromage : du théorique, de l'empirique et beaucoup de pifomètre. J'espère que mon boulot vieillira aussi bien qu'un produit AOC.

Comment réalises-tu tes planches ? A la main ou à l'ordinateur ?

A la main bien sûr ! L'ordinateur n'est là que pour m'aider à aller plus vite ^^.
Sinon, plus sérieusement, la seule étape réalisée sur papier est le storyboard (de temps en temps je fais encore un crayonné par-ci par-là pour une illustration).

Freaks' Squeele

Pourquoi avoir choisi de faire une partie de la BD en niveaux de gris et l'autre en couleur ?

Le n&b c'est un moyen d'expression extraordinaire, car il permet d'aller vite et on peut raconter plus d'histoire pour pas trop cher (tradition du manga et du fumetti). En plus, avec le n&b, je peux me concentrer sur les lumières et rendre des atmosphères que je trouve plus touchantes qu'en couleur.
La couleur, c'était pour me faire plaisir et pour faire plaisir au lecteur, il y a beaucoup de choses qu'on ne peut représenter en n&b et que seule la couleur peut restituer.
Au final, je ne me suis même pas posé la question de ce mix qui peut paraître incongru, car Mutafukaz, certains mangas et mes vieux Picsou Magazines étaient un mix couleur/n&b.

C'est quoi le plus dur à dessiner dans Freaks' Squeele ?

Les décors... Je m'efforce de faire voyager le lecteur et pour ça il faut imaginer des architectures qui font rêver, retranscrire les sensations, mettre à contribution tous les sens.
Bref jouer avec la mémoire du lecteur et sa propre culture. C'est certainement la tâche la plus difficile de mise en scène.
Les personnages coulent de source, ils ont pris vie d'eux-mêmes depuis longtemps et je n'ai que peu d'effort à fournir pour les restituer.

Freaks' SqueeleQuel est ton personnage préféré dans Freaks' Squeele ? Pourquoi ?

C'est une question difficile, je crois que n'ai pas de personnage préféré.
Mais si je devais choisir un personnage duquel je me sens le plus proche, je dirais que c'est Ombre.
C'est un homme moderne qui doit vivre dans un monde de plus en plus féminisé.

Est-ce que ton expérience d'illustrateur et designer de figurines pour Rackham t'aide dans la réalisation des personnages de Freaks' Squeele (vu qu'ils ont tous un petit côté « monstre », « créature ») ?

Je pense que oui, ce que j'ai pu faire chez Rackham m'a fortement influencé dans ma méthode de travail et dans la volonté de soigner les détails.

Un scoop sur le volume 2 de Freaks' Squeele ?

Ombre y sera à l'honneur et il y aura de grandes révélations sur les forces en présence qui influencent l'avenir de nos héros.

Quelles sont tes sources d'inspiration ?

J'essaie d'avoir la rigueur des scénaristes de séries américaines, je trouve que la qualité et l'ingéniosité atteint des sommets (Dr House, Desperate Housewives, Battlestar Galactica, etc.).
Sinon, j'aime beaucoup le cinéma bis (Carpenter, Romero, Rodrigez, etc.), voire les nanars...
Je regarde aussi beaucoup de films asiatiques (Tsui Hark, Johnnie To, Akira Kurosawa).
Je tire mes idées de ce que je trouve touchant dans la réalité (ma compagne, par exemple, a beaucoup déteint sur le personnage de Xiong Mao) pour avoir une démarche la plus honnête possible. Je me suis inspiré de ma propre expérience des arts martiaux pour certaines scènes et la vie estudiantine est une restitution de mes souvenirs de la fac.
Par exemple, je ne voulais pas écrire une histoire sur la guerre alors que je ne l'avais jamais vécue, de près ou de loin.
L'actualité est aussi une source d'idées.

Qu'est-ce que tu lis comme BD ?

De tout, pourvu que la qualité de l'écriture graphique et scénaristique soit là : Blain, Sfar, Moebius, Jodorowski, Bess.
En manga j'aime beaucoup Urasawa (20th Century Boys), Samura (L'habitant de l'infini), Takahashi (Ranma 1/2), ou encore Azuma (Yotsuba).
En comics, j'apprécie le travail de Neil Gaiman et d'Alan Moore.
Et je suis un bon client de ce que fait le label 619. Très sérieusement, ce que font Run et Raf est à mon avis le renouveau de la BD occidentale.

Freaks' SqueeleSur ton blog [saignecrapaud.blogspot.com], tu présentes quelques uns de tes travaux. Considères-tu ton blog comme un outil de promotion de ton travail ou juste comme un passe-temps / un défouloir ?

Pour moi, c'était avant tout une sorte de site personnel pas compliqué à monter. Il se trouve que je peux répondre à des messages, ce qui est aussi bien.
J'aimerais beaucoup tenir un blog « billet d'humeur » pour installer un dialogue avec les gens, mais je n'en ai pas le temps...

Qu'est-ce que tu penses du phénomène blog BD ?

Pour le peu que j'en ai vu, je trouve ça extrêmement positif. Si les gens se contentaient uniquement de lire les BD sur internet « gratuitement », ça serait dangereux, mais l'expérience a prouvé que le public était prêt à acheter en version papier ce qu'il avait déjà lu sur le net (il n'y a qu'à voir le succès de Maliki). Ça me rassure quant à l'avenir du livre. En dehors de ça, c'est la chance pour de jeunes auteurs ou des amateurs de trouver leur public, et pourquoi pas le succès. C'est très stimulant !

Est-ce que tu suis des auteurs amateurs / le monde du fanzinat ?

J'encourage certains talents rencontrés sur la toile ou à des conventions, mais dire que je les suis serait un bien grand mot. Je n'ai jamais eu ni le courage ni le temps de m'investir plus loin que ça dans le fanzinat.

As-tu des projets en dehors de Freaks' Squeele ?

Pour l'instant, non. Je me suis donné tellement de liberté que je peux raconter tout ce qui me passe par la tête dans l'univers de FS. J'ai un projet de spin-off, mais c'est encore très flou. Si l'auteur que je pressens pour cette série décline l'offre, ce projet sera intégré à l'histoire de FS.

Que dirais-tu à quelqu'un qui ne connaît pas ton univers pour lui donner envie de lire Freak's Squeele ?

Que c'est moins bête que ça en a l'air.
Que derrière chaque scène d'action décomplexée, derrière chacun des personnages, il y a un propos et une histoire.
Que j'ai écrit et dessiné FS avec tout mon coeur.

Le mot de la fin...

Il vaut mieux mûrir à point que pourrir.


5 Questions à la con


Et pour conclure, cinq questions incongrues, auxquelles Florent a répondu du tac au tac en live (c'est le but ^^), bref, c'est l'heure des Questions à la con !

Comme on a vu que tu postais sur nanarland [www.nanarland.com], et que tu aimes bien les nanars, on a fait un petit questionnaire pour tester ton degré de nanaritude. T'en fais pas, c'est des grands classiques.
Première question : cite trois titres de nanars.


Nukie, L'Homme Puma et euh, chépa moi, Delta Force ?

Si t'étais un nanar, tu serais lequel ?

Nukie.

Plutôt Le retour des tomates tueuses ou Turkish Star Wars ?

Turkish Star Wars.

Le Ninja Blanc ou Supersonic Man ?

Le Ninja Blanc, parce que je l'ai vu en plus.

C'est qui le plus fort, Godzilla ou Braddock ?

Braddock, parce qu'il met les pieds où il veut...

Score : 2 en 1 !!!

5 Questions à la Con

Yadana

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